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(Neuf heures quarante et une minutes)
M. Paradis : Très bien.
Aujourd'hui, nous sommes à l'Assemblée nationale parce que le ministre du
Travail est interpelé sur l'importance du droit de grève dans l'histoire du
Québec. Et j'ai bien hâte de l'entendre parler, parce que c'est un droit
important, encadré par plusieurs lois, encadré constitutionnellement au Québec.
Et lui, il vient de bouleverser ce fragile équilibre des négociations entre les
employeurs et les employés au Québec.
Il n'a consulté personne avant d'arriver
avec cette réforme. On en a eu la confirmation lors des consultations particulières.
Et là, il va remplacer un droit encadré par un pouvoir de gouvernance par
décret. Désormais, le ministre se confère le droit de déclarer que, pour telle
entreprise ou pour tel service, il va y avoir des services qui vont devoir être
maintenus malgré un conflit de travail, parce qu'ils sont essentiels au
bien-être de la population. Et surtout, il se donne le pouvoir discrétionnaire
de mettre fin à toute grève puis de renvoyer les gens au travail s'il estime
que ça peut porter un préjudice important.
Alors, pouvoir encadré, droit encadré
remplacé par un pouvoir discrétionnaire, et ça devient malheureusement la
marque de commerce de ce gouvernement de la CAQ qui voit peut-être venir le
fait qu'il est en fin de régime. On voit ça dans plusieurs lois qui ont été
adoptées récemment, on remplace un cadre législatif par un pouvoir
discrétionnaire. Aucun expert indépendant qui est venu en commission
parlementaire ne s'est prononcé en faveur de ce projet de loi. Aucun. Tous ceux
qui sont des experts en droit du travail ou en relations de travail ont dit :
Nous ne sommes pas d'accord et ils ont même prévu des années de disputes
constitutionnelles devant les tribunaux et un potentiel effet inverse sur la
paix des relations de travail au Québec. Donc, j'ai hâte de l'entendre ce
matin. Moi, en tout cas, c'est sûr que je vais réitérer notre opposition à ce
projet de loi.
Journaliste : Concernant les
révélations qu'on a eues hier à la Commission Gallant, le fait qu'il y a eu des
contrats, des appels d'offres taillés sur mesure, le fait également qu'on a vu
les coûts exploser, vous en pensez quoi?
M. Paradis : Ce n'est que le
début, et ce qui est révélé, jour après jour, c'est ce que les Québécois,
malheureusement, voyaient venir et c'est ce que les oppositions évoquent depuis
plusieurs semaines : absence de concurrence dans l'octroi de contrats pour
des montants faramineux. Des gens... Tous les gens impliqués sont des gens qui
se connaissent, qui ont des liens personnels, des liens professionnels passés
ou présents, surfacturation, gonflement des tarifs horaires, c'est ça qui est
en train d'être révélé. Et remarquez que le Parti québécois... je me souviens d'un
point de presse ici qui a été donné par Paul St-Pierre Plamondon, où on faisait
des calculs, c'étaient des estimés. Mais quand on prend le montant de 1,2 milliard
puis qu'on commence à faire des règles de trois, ça fait des millions d'heures
de travail à un taux horaire, on l'avait estimé, disons, à 200 $ de l'heure.
Des millions d'heures. Où sont ces millions d'heures là? C'est impossible, ça
ne fonctionne pas.
Ce qui est très préoccupant, c'est de
savoir que le gouvernement du Québec a payé un demi-milliard de factures en
excédant des montants initialement prévus et qu'il continue de dire qu'il ne
savait rien de tout ça. Tout ce dont on est en train de parler s'est passé au
nez et à la barbe de ce gouvernement de plusieurs ministres qui continuaient de
payer des factures sans poser de questions. C'est ça, le nœud de l'affaire. Et
on n'a entendu aucun ministre jusqu'à maintenant, et vous le savez, ce qu'on en
pense. Quand on va entendre des ministres... tous les gens qui vont juger de la
crédibilité de leur témoignage sont des liens... ont des liens personnels ou
professionnels avec eux.
Journaliste : ...M. Paradis,
tout ça commence, puis on l'a découvert hier avec les vérificateurs internes,
alors que ce n'était pas la CAQ qui était au pouvoir, là, ça commence en 2015
et peut-être même sous le Parti québécois.
M. Paradis : Bien là, vous
supposez des éléments. Actuellement...
Journaliste : ...ça a été dit
hier en commission que ça commencerait en 2015. Donc, oui...
Journaliste : ...
M. Paradis : ...Sous un
gouvernement libéral, c'est ça qui est sorti hier. Remarquez que nous, nous
avons proposé dès le début que ce ne soit pas une enquête uniquement sur le
contrat SAAQclic. C'est un problème généralisé. Nous l'avons dit, nous le
répétons, je le réitère aujourd'hui, c'est un problème généralisé, la question
des contrats informatiques. Nous avons demandé une enquête globale, parce que
ce problème de surfacturation, ce problème de contrats entre des gens qui sont
manifestement liés entre eux, où il y a des apparentés, où il y a des problèmes
de surfacturation, des heures dont on ne sait pas comment elles pourraient
avoir raisonnablement été consacrées au projet. C'est généralisé. On continue à
demander ça. Ils ont continué à demander que ce soient les bonnes personnes qui
mènent l'enquête.
Journaliste : Donc, selon
vous, ça se passe encore, entre autres, pour les projets d'informatisation pour,
bon, les garderies, les CPE, en santé. Ce genre de pratique là a lieu là, là?
M. Paradis : Évidemment, là,
on ne peut pas... Si vous me demandez quel cas aujourd'hui, je ne vous dirai pas
: il y a tel ou tel cas. Mais c'est un problème, on le sait, là. Les coûts...
Journaliste
: C'est une
pratique.
M. Paradis : ...les coûts
informatiques ont explosé au Québec alors que, notez bien, notez bien que c'est
une promesse du gouvernement de la CAQ lorsqu'il s'est présenté en 2018, il a
spécifiquement parlé... le premier ministre du Québec, là, alors qu'il était
dans l'opposition, Éric Caire alors qu'il était dans l'opposition, disait... il
visait spécifiquement les contrats informatiques puis il disait : On va
faire le ménage là-dedans. Non seulement il n'y a pas eu de ménage, le problème
s'est aggravé. Alors, oui, c'est pour ça qu'on a besoin d'analyser l'ensemble
des contrats informatiques du gouvernement.
Journaliste : Mais
croyez-vous que ça se passe encore? C'est un peu ça, la question de mon
collègue.
M. Paradis : Notez... c'est...
Il faut faire attention, là, parce qu'il y a des allégations là-dedans de
fraude, il y a des allégations de pratiques douteuses. La commission commence à
faire la lumière là-dessus. Donc, il faut faire attention quand on parle de ça.
Mais notez bien que les contrats ou la gestion de ces contrats-là a été
suspendue pendant un certain temps par l'AMP. Là, on a repris, mais ils ont dit...
Journaliste : ...au-delà de
SAAQclic, là, je vous parle, entre autres, pour les garderies, le système de
santé, même l'octroi de contrats...
M. Paradis : Vous, vous
parlez au-delà des contrats informatiques?
Journaliste : Au-delà des
contrats informatiques, est-ce que vous croyez qu'après tant d'années de la
commission Charbonneau il y a encore des pratiques douteuses qui se font? Parce
que, M. Leduc l'évoquait tout à l'heure, peut-être qu'on baisse la garde à
un certain moment donné puis on se dit : O.K., ça doit être réglé. Vous, est
ce que vous avez l'impression qu'actuellement il y a peut-être des choses
croches qui se font encore?
M. Paradis : Les coûts de
tout ce qui se fait par le gouvernement ont beaucoup augmenté dans les
dernières années puis il faut chercher partout quelles sont les solutions.
Cette semaine, encore, on parlait du coût des infrastructures. Pourquoi ça
coûte plus cher qu'avant? Alors, il faut regarder les contrats sous toutes
leurs coutures, notamment sur ceux des pratiques.
Et est-ce qu'on a baissé la garde? La
question se pose. L'année dernière, souvenez-vous, l'année dernière, il y avait
un projet de loi qui était sous étude sur les nouveaux modes de gestion des
contrats des infrastructures, le projet de loi n° 62. J'ai évoqué ça à
plusieurs reprises. J'ai demandé au gouvernement, j'ai demandé au ministre des
Infrastructures : Oui, mais dans ce projet de loi là où sont les leçons
apprises de la commission Charbonneau, comment en avez-vous tenu compte? Et je
n'ai jamais eu de réponse là-dessus... a dit : Ah! oui, on a fait l'exercice.
D'accord, mais il est où le... où il est, cet exercice-là? Donc, il ne faut pas
baisser la garde.
Journaliste : Est-ce que l'industrie
informatique de numérisation est une sorte de nouvelle industrie de la construction,
quand on parle de faire affaire avec le gouvernement, d'après vous?
M. Paradis : C'est
intéressant la question que vous poser, parce que le secteur informatique peut-être
a été vu comme un nouveau secteur, là, où c'est un domaine qu'on en connaît
peu, puis c'est... des nouvelles technologies, des nouvelles façons de faire,
mais la façon de passer des contrats, elle, demeure la même. Donc, est-ce que
des pratiques, qui sont nuisibles à l'efficacité de ces contrats-là, qu'on
avait vues ailleurs puis qui ont été corrigées ou qui ont été identifiées dans
la commission Charbonneau, se sont installées dans d'autres secteurs? La
question se pose et c'est pour ça qu'il fallait faire une enquête, qu'il
fallait faire la lumière sur l'ensemble de ces contrats-là, pas juste le
contrat SAAQclic. Le contrat SAAQclic nous donnera un exemple. J'espère que ce
sera une inspiration ce qu'on va trouver, parce que ce n'est pas terminé, j'espère
que ce sera une inspiration, mais on aurait eu intérêt à revoir tous ces
contrats-là puis à le lier à plein d'autres questions, là : la
souveraineté numérique du Québec, la protection de nos données, la protection d'informations
essentielles à l'économie puis à la vie privée de tout le monde au Québec qui
sont dans les mains d'entreprises étrangères, qui sont contrôlées à l'étranger.
Ce sont toutes des questions qui se posent et qui sont liées les unes aux
autres. Puis actuellement on ne voit pas quelle est la vision de ce
gouvernement-là sur l'ensemble de ces questions.
Journaliste : Le débat du
parti libéral, hier...
Journaliste
: …dans
votre comté, en plus, vous avez subi ça.
M. Paradis : J'aimerais vous
répondre… bien, je ne sais pas ce que j'aimerais vous répondre, mais non, je ne
l'ai pas suivi, je vais être très franc avec vous. Vous savez, il y a des travaux
parlementaires actuellement qui nous prennent beaucoup de temps. D'ailleurs, je
vous invite à les suivre. Il se passe des choses très importantes, actuellement,
à la commission parlementaire sur le projet de loi n° 69. J'y étais très
concentré jusque tard hier soir. Vous avez vu des démissions de personnel clé,
hier, vous avez vu des déclarations, des articles qui sont… aujourd'hui sur la
volonté du gouvernement, du P.D.G. d'Hydro-Québec et du premier ministre de
faire table rase. En tout cas, c'est la… je pense que c'est la… c'est le titre
d'un des articles aujourd'hui qu'on voit, de l'époque Pierre Fitzgibbon.
Une cinquantaine d'amendements très
importants qui nous sont littéralement garrochés, c'est ça, le bon mot québécois,
garrochés en pleine commission parlementaire. Il y a… au milieu de nos travaux,
hier après-midi. Ce projet de loi est très inquiétant. Il est dangereux pour l'avenir
du Québec. Là, on nous envoie à la dernière minute des modifications. Ça vient
toucher la privatisation de la vente d'électricité. C'est le Pacte québécois
sur l'énergie. Ça vient toucher la tarification, qu'est-ce qu'on met dans le
calcul des tarifs de toutes les Québécoises et de tous les Québécois. On est en
train de tout modifier ça. On est en train… alors qu'on a un discours de
respect de la Régie de l'énergie, on est en train d'émasculer la Régie de l'énergie
et on est en train d'établir une gouvernance par décrets, où c'est le
gouvernement du Québec qui va décider d'à peu près tout ce qu'il y a d'important
dans le secteur de l'énergie.
Et là le gouvernement du Québec semble
marcher main dans la main avec Hydro-Québec. Ce n'est pas comme ça que les
relations doivent se passer. Tout ça sans consultation, donc on a… on s'est
vanté de consultations particulières, qui ont été préparées, organisées, tenues
sur la base d'un projet de loi qui a radicalement changé. Ça ne va pas du tout,
là. C'est l'avenir économique, énergétique et social du Québec qui est en jeu.
Alors, moi, c'est ce que je faisais hier soir. Merci.
(Fin à 9 h 52)