(Neuf
heures trente-trois minutes)
La Présidente (Mme
Dionne) : Alors, bon vendredi, tout le monde. Bienvenu à cette séance.
Ayant constaté le quorum, je déclare la Commission spéciale sur les impacts des
écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes
ouverte.
Je vous souhaite la
bienvenue et je vous demande, à toute personne qui a un cellulaire, de vouloir
éteindre la sonnerie. Merci beaucoup.
Alors, la commission
est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions
publiques sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé des
jeunes.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Non, Mme la Présidente.
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
cet avant-midi, nous entendrons le Conseil en éducation des Premières
Nations, le docteur Patrick Giroux, professeur en technologie éducative et
chercheur associé, et HabiloMédias.
Donc, je souhaite la
bienvenue à nos premiers témoins, donc, M. Bruno Rock, coordonnateur des
projets éducatifs, et M. David
Vigneault, conseiller technologique... en technologies de l'information et de
la communication. Alors, bienvenue à
cette commission. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous
faire part de votre exposé, et ensuite
on procédera à une période d'échange avec l'ensemble des membres de la
commission. Donc, la parole est à vous.
Conseil en éducation des Premières Nations (CEPN)
M. Rock
(Bruno) : «Kuei kassinu etashiek.» (S'exprime en innu).
Bonjour, Mme la
Présidente. Mmes, MM. les députés. Mon nom, Bruno Rock. Je suis coordonnateur
aux projets éducatifs au Conseil en éducation des Premières Nations et je viens
de la communauté innue de Pessamit. Je suis
accompagné de David Vigneault, qui est conseiller pédagogique en technologies
de l'information et de l'information, et on va partager notre temps à
deux. Au nom du Conseil en éducation des Premières Nations, nous vous
remercions de cette invitation.
Le CEPN. C'est quoi, le CEPN? On célèbre nos
40 ans en 2025. C'est une association mandatée par 22 communautés
des Premières Nations sur les vastes territoires connus, présentement, comme
Québec. Notre objectif est d'appuyer la prise en charge et le contrôle de l'éducation
par et pour les Premières Nations, à savoir une éducation qui intègre les
savoirs traditionnels et les pratiques éducatives adaptées pour améliorer la
réussite scolaire et renforcer le lien culturel des élèves avec leurs
communautés.
Le CEPN n'est pas un
centre de services scolaires, notre mission est plus large que ça. Nous sommes
un porte-étendard des intérêts des communautés pour que les Premières Nations
exercent localement leur gouvernance en éducation.
Considérant notre
mission, notre présentation et nos propositions porteront de façon spécifique
sur le volet éducatif de l'enjeu présenté à cette commission, à savoir les
mesures d'encadrement des écrans, notamment à l'école et sur le Web, y compris
l'accès aux outils numériques d'apprentissage.
Afin de remplir
efficacement nos mandats, nous soutenons les organismes éducatifs des Premières
Nations qui, à leur tour, offrent des services directs aux élèves, représentant
près de 6 000 jeunes. Nous offrons, entre autres, des services en éducation
spécialisée, en conseillance pédagogique, en langues et cultures, en
administration scolaire, en gouvernance des données et en technologies
éducatives.
Comme
vous le savez déjà, l'accès aux services et aux outils technologiques est
essentiel. Grâce à une approche d'économies d'échelle, le CEPN dessert
une vingtaine de communautés avec la fibre optique, non seulement dans les
écoles, mais également dans les autres services publics des communautés,
permettant ainsi de surmonter les barrières géographiques et l'isolement
éducatif.
Exemple
concret : l'an dernier, la première nation attikamek de Manawan a inauguré
sa nouvelle école primaire, l'école
primaire Awacak. Le CEPN a joué un rôle de premier plan en déployant au total
38 kilomètres de câble réseau, 81 antennes
wifi et 600 connecteurs réseau, ce qui facilite la création d'une
communauté d'apprentissage professionnelle.
Entre autres, les
enseignants de nos communautés déploient une culture de collaboration et de
partage des capacités permettant ainsi le développement des programmes et des
stratégies d'enseignement conçus par et pour les Premières Nations. Cet accès
leur permet de se doter des ressources pédagogiques culturellement et
linguistiquement appropriées. Ce sont les ingrédients d'une stratégie d'apprentissage
gagnante plaçant l'élève au coeur de la démarche avec son identité, sa langue,
sa culture.
Un
autre exemple concret : en septembre 2024, le CEPN a dévoilé le portail
éducatif Les Voix du territoire, qui compte
désormais près de 8 000 utilisateurs uniques. Il offre des ressources
fiables sur les réalités et les perspectives des Premières Nations et
des Inuits au Québec, pour tous les enseignants, qu'ils soient autochtones ou
allochtones.
Ces ressources
numériques, en plus d'être moins coûteuses, sont conçues pour permettre aux
jeunes des Premières Nations de développer
un grand sentiment d'appartenance. Par exemple, le portail propose des
interactions avec des gardiens du savoir, des informations sur les nations, les
territoires, les cultures, les traditions ainsi que des récits et légendes. C'est pourquoi maximiser les atouts des écrans et
offrir un encadrement adapté à leur utilisation est primordial.
D'ailleurs, lors de la crise sanitaire, nous avons conçu des guides sur
l'apprentissage en ligne en milieu Premières Nations ainsi que sur
l'utilisation des médias sociaux en milieu scolaire.
Ainsi, comme en
témoignent les initiatives présentées, les écrans sont des outils d'aide à
l'apprentissage et non des moyens d'apprentissage. Toutefois, en parallèle, il
est de notre responsabilité collective de veiller à ce que leur intégration se fasse en cohérence avec la
préservation du patrimoine culturel et linguistique des Premières
Nations.
Je passe maintenant
le bâton de la parole à mon collègue, David. «Tshinashkumitinau.» Merci
beaucoup.
• (9 h 40) •
M. Vigneault (David) : «Kwei keskina. Nin Tapit
Pigno.» Bonjour, je suis David Vigneault. Je suis conseiller aux technologies de l'information et des
communications au CEPN. Je possède une vaste expérience en enseignement,
tant dans le réseau scolaire québécois que dans le milieu scolaire des
Premières Nations au Québec.
Bien qu'il existe des
similarités entre ces milieux, comme l'isolement géographique ou les
contraintes socioéconomiques, les objectifs,
les environnements, les méthodes d'enseignement et les rôles des équipes-écoles
sont différents. En milieu autochtone, les
outils technologiques, dont les écrans, aident à dépasser les barrières de
communication et les exigences d'écriture qui sont à l'encontre de la tradition
orale.
À titre d'exemple, le
CEPN a collaboré à la création d'un balado, dans la communauté anishnabe de
Lac-Simon, pour les élèves dont le français n'est pas la langue maternelle. Cet
outil leur a permis de communiquer leur compréhension autrement via les
nouvelles technologies. La réponse des élèves au projet fut phénoménale et les
résultats furent encore meilleurs qu'envisagé.
D'ailleurs, ce n'est
pas qu'en milieu isolé que les écrans s'utilisent de façon positive. L'école
Wahta', de Wendake, a créé une classe-musée qui inclut des projets sur divers
sujets et permet aux élèves de participer à des projets de réalité augmentée.
Un autre exemple
concret qui illustre notre capacité à maximiser les impacts positifs des
écrans, l'école Awacak de Manawan nous a contactés en mars 2024 pour former
leurs enseignants, majoritairement du premier cycle du primaire, pour encadrer
l'utilisation et la gestion des iPad en classe afin que les élèves n'aient
accès qu'aux sites Web et qu'aux applications que les enseignants auront ciblés
pour eux.
Nous reconnaissons
que, sans encadrement, l'utilisation des écrans et ressources numériques, même
à des fins pédagogiques, peut entraîner certains effets négatifs sur le
développement de l'enfant. Toutefois, ces outils en milieu premières nations,
et sans s'y restreindre, rendent l'éducation plus accessible, aident à briser
l'isolement, créent des communautés d'apprentissage, valorisent des ressources
basées sur l'identité, la langue et la culture et, si le tout est bien utilisé,
incitent l'élève à la persévérance scolaire dans un environnement
culturellement sécurisant.
Enfin, nous croyons
également que ces technologies aident à surmonter des désavantages historiques
et structurels et à fournir des moyens pour le renouveau socioéconomique par et
pour les Premières Nations. D'ailleurs, dans son dernier rapport sur la
réussite éducative des élèves autochtones, le Vérificateur général rappelle le
rôle crucial de l'éducation dans la lutte contre la pauvreté, l'enrichissement
sur le plan social, culturel et économique. Un accès limité à l'éducation nuit
à l'employabilité et aux occasions de participer à la vie de la société.
L'accès aux technologies numériques en milieu autochtone réduit l'impact de ces
défis.
Finalement, le CEPN
estime que cette étude devrait intégrer l'approche holistique, les définitions,
les valeurs et les réalités des Premières Nations dans la formulation de toute
conclusion concernant l'utilisation des écrans pour des fins éducatives. Les appels à l'action 11 et 21 du rapport de
la commission Viens recommandent au gouvernement de tenir compte des
besoins et des stratégies identifiés par les Premières Nations et Inuits en
matière d'éducation. Notre vision aidera grandement les membres de la
commission dans leurs réflexions et dans leurs discussions à venir.
«Ekote mikwetc.» Ce
sera tout, merci.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci infiniment. J'aurais envie de vous remercier en innu,
mais je ne voudrais surtout pas massacrer votre belle langue. Alors, nous
allons procéder à une période d'échange. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve,
la parole est à vous.
M. Leduc : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Très content de vous voir ce matin.
Merci pour votre contribution, elle est fort appréciée. Je vais vous amener sur
des aspects très pointus de nos réflexions actuelles.
Vous avez peut-être
vu, évidemment, les médias et toutes les discussions qu'on a par rapport, par
exemple, à l'interdiction du cellulaire à
l'école. Vous savez que c'est interdit dans les classes depuis mars dernier.
Dans nos tournées, nos consultations,
peu de gens, voire personne n'a remis ça en question. Mais là la discussion
qu'on doit avoir puis qu'on doit
trancher éventuellement, les élus, c'est : Est-ce qu'on interdit au
complet à l'école? Et, si oui, qui devrait prendre la décision? Est-ce
que ça doit être les conseils d'établissement, et donc école par école, le
centre de services scolaire? Est-ce que ça
doit être une directive du ministère au grand complet? Ça fait que ça, c'est ma
première question pour vous.
Puis en parallèle il
y a toute la question de la majorité numérique. Est-ce qu'on doit mettre une
majorité numérique? Puis, si oui, à quel
âge? 14, 16, 18 ans? Et, dans les réalités autochtones que vous
représentez aujourd'hui, comment tout ça pourrait atterrir? Avec des
défis ou pas? Voilà.
M.
Rock (Bruno) : Je vais laisser mon collègue répondre à la deuxième
question sur la majorité numérique. Mais concernant le cellulaire à l'école,
étant donné que notre structure de gouvernance n'est pas du tout la même,
comparativement à la province, nous, c'est vraiment... on part... c'est les
écoles, et les communautés, et les conseils, le
gouvernement des communautés qui décident vraiment de qu'est-ce qui est bon
pour leurs jeunes. Nous, le CEPN, on est
vraiment là pour conseiller, c'est un conseil, donc on est vraiment plus à
titre aviseur. Par contre, c'est certain que nous, tu sais, on ne s'est
pas positionnés directement sur cette question-là, comme je vous dis, c'est
vraiment aux écoles. Par contre, on a posé la question aux communautés, quand
cette règle-là est sortie, a été appliquée, en début d'année scolaire, puis je
vous dirais qu'il y a des écoles qui sont allées de l'avant avec l'interdiction
formelle, alors que d'autres, non. Ça fait qu'on n'est pas allés plus loin de
ce côté-là.
M. Leduc : Mais
est-ce que je déduis que, si on devait aller vers une interdiction, une
interdiction mur à mur de la part du
ministère, vous, vous seriez plus ou moins intéressés par ça, vu que... Là, mes
connaissances sont limitées, mais
j'assume que vous devez appliquer une partie du programme du ministère puis
peut-être... Je ne sais pas trop comment ça marche dans le concret, là,
mais bref, est-ce qu'il y a... est-ce qu'une directive du ministère, ce serait
quelque chose qui vous heurterait un peu dans votre situation?
M. Rock (Bruno) : Pas vraiment, étant
donné, encore une fois, comment on est... on gère... comment les écoles
sont gérées, c'est-à-dire. On n'est pas soumis obligatoirement, on n'est pas
soumis de suivre toutes les règles du ministère de l'Éducation. Donc, c'est
vraiment les écoles qui décident de leurs positions.
M. Vigneault
(David) : Mais, pour la deuxième partie de la question, je voudrais
juste valider, quand vous parlez de majorité numérique, qu'est-ce que vous
voulez dire précisément?
M. Leduc : C'est
de mettre une loi, un peu comme pour acheter de l'alcool, par exemple, il faut
avoir 18 ans, pour avoir un compte de médias sociaux, il faut avoir 14,
16, 18 ans.
M. Vigneault
(David) : Je pense que, si je ne me trompe pas, présentement, la
plupart recommandent 13 ans. Mais, en
même temps, moi, mon rôle dans l'organisation, c'est de m'assurer qu'à
l'intérieur des écoles ce soit utilisé de façon adéquate. Donc, ça, c'est un peu en dehors de mes juridictions, de
qu'est-ce que je fais. Maintenant, s'il y a une loi qui s'applique, c'est sûr que je vais en tenir
compte de façon à proposer des outils qui correspondent à ce que les
élèves peuvent et doivent utiliser. Mais, de là à être capable de recommander
l'âge, ce ne serait pas... ce n'est pas vraiment de mon expertise.
M. Leduc : En
même temps, vous êtes un pédagogue, si je comprends bien, vous avez de
l'expérience. De votre avis un peu spontané, peut-être, à partir de quel âge
vous considérez qu'un adolescent a assez de discernement pour pouvoir naviguer
de manière libre sur un média social?
M. Vigneault
(David) : Encore là, c'est une question que... qui va au-delà du cadre
de mes fonctions. Comme je dis, moi, je suis là pour m'assurer que les outils
pédagogiques sont utilisés et adéquats. Puis les outils pédagogiques qu'on propose en classe, de primaire à secondaire, sont...
correspondent aux capacités et à la maturité des élèves. Si on dit, par
exemple : Faire une recherche par eux-mêmes sur Internet, c'est sûr qu'on
ne proposera pas ça, nécessairement, aux
premières... aux élèves de première année, deuxième année. Mais, plus qu'on va
arriver vers la fin du secondaire, plus les élèves vont être
indépendants. Si on parle des médias sociaux, ça n'a pas vraiment rapport avec
le contexte scolaire, mis à part le fait qu'une école peut avoir une page sur
les médias sociaux pour parler de ce qu'ils font. Mais l'élève en tant que tel
versus les médias sociaux, c'est extrascolaire.
M. Leduc : Merci
beaucoup.
M. Rock
(Bruno) : Mais pour compléter dans cette voie-là, c'est certain que,
dans la façon qu'on fonctionne, aussi, au
CEPN et dans les communautés, si jamais on a à se prononcer sur, justement, la
majorité numérique, ce n'est pas nous, au CEPN, qui allons prendre la
décision, comme je le répète. Ce qu'on va faire, c'est qu'on va rassembler des
experts des écoles, on va faire un comité, puis c'est vraiment le comité qui va
se positionner, se positionner mais plus à titre aviseur, encore une fois, là,
pour possiblement produire quelque chose, un document quelconque qu'on va distribuer aux communautés, aux écoles puis qu'à
ce moment-là c'est elles qui vont décider si elles vont l'appliquer ou
pas.
M. Leduc : Merci.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci beaucoup. Je passe maintenant la parole à Mme la
députée de Hull.
Mme Tremblay : ...peut-être différent d'une école à l'autre, bon, bien, ça semble être...
tu sais, l'utilisation, là, des
écrans, des technologies semble être au coeur, là, de l'enseignement, des
méthodes pédagogiques que vous utilisez, pour les raisons que vous avez
énumérées. Ils sont équipés comment? Est-ce que chaque élève a son iPad, un
ordinateur? Comment ça fonctionne dans vos écoles?
M. Vigneault
(David) : Bien, en fait, c'est ça, ça dépend, il n'y a pas de plan
uniforme proposé. Comme chaque école est maître de ses décisions et de ses
dépenses, c'est l'école qui va selon ce qu'ils identifient comme besoins. Tu
sais, ça peut aller de : il y a beaucoup d'équipements... Je peux vous
donner l'exemple, par exemple, de l'école Amik-Wiche, à Lac-Simon. En fait, les
deux écoles, à Lac-Simon, ont un personnel, une direction qui sont vraiment
très axés vers les technologies, qui croient beaucoup à ça. Ça fait que, eux,
leur parc informatique est vraiment très garni, et ça va des lunettes Meta
Quest, aux iPads, les imprimantes 3D. Eux, ils ont vraiment embarqué là-dedans
puis ils s'en servent au maximum.
Comme, vous voyez, ils m'ont écrit, juste avant
qu'on rentre, comme, à 9 h 28, pour me dire qu'ils avaient développé
un projet avec des lunettes de réalité virtuelle pour être capables de se
promener dans certains endroits de la nature, virtuellement, dans les moments
donnés où ça ne sera pas possible. Parce qu'il y a beaucoup de... comment je dirais, il y a beaucoup d'immatériel, dans la
façon culturelle autochtone d'enseigner, puis ces outils-là
technologiques permettent, d'une certaine façon, de capturer cet immatériel-là,
capturer les moments qu'on peut un peu revivre. Et ceux qui... les écoles qui
croient vraiment à cette façon de faire vont s'équiper en fonction.
En même temps, ils vont venir me demander des
recommandations, qu'est-ce qu'ils pensent... qu'est-ce qu'on recommande qu'ils
achètent, etc. Ce n'est pas toutes les écoles qui sont équipées autant que
Lac-Simon, par exemple, mais toutes les écoles sont bien équipées. Puis pour
avoir enseigné, oui, dans le réseau provincial, mais j'ai enseigné aussi à
l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve, les écoles autochtones sont beaucoup
mieux équipées, technologiquement, que ce que j'ai vu ailleurs. Ce n'est même
pas la même ligue.
• (9 h 50) •
M. Rock (Bruno) : Puis en termes
d'équipement, évidemment, toutes les écoles sont équipées de Smart Boards. La plupart, évidemment, aussi ont des
iPads. Puis on a fait sortir ces chiffres-là, récemment, puis je vous
dirais que ce n'est pas toutes les écoles que c'est du un pour un, mais,
beaucoup d'écoles, c'est toujours un pour un. Puis, parmi les
6 000 élèves, comme on le disait, il y en a quand même 2 800,
là, qui ont un iPad à leur disposition.
Puis c'est certain que, tu sais, pour revenir un
peu au mandat du CEPN, on est là vraiment pour les accompagner. Le CEPN a été
vraiment précurseur et a été rapide dans l'instauration puis le déploiement des
outils numériques, dès les années 90,
je dirais, avec... Il fallait pallier, vraiment, à l'éloignement puis à
l'isolement géographique. Les 22 communautés membres sont isolées
les unes des autres, donc tout ça facilite notre rapprochement.
Mme
Tremblay : Il y a des effets, là, vous le savez, là, de
l'utilisation, là, des écrans prolongés chez les jeunes, puis ça inclut
autant l'école que la maison. Plusieurs intervenants nous ont dit à quel point
c'était important, la prévention, tu sais, au niveau de la famille, parce que,
bon, il y a beaucoup... il s'en passe beaucoup à la maison, donc ils utilisent
les médias sociaux dans l'école aussi. Est-ce que vous avez ce rôle-là? Est-ce
que vous envoyez de l'information de vos préventions, justement, pour, tu sais,
les parents, par exemple, que le nombre d'heures... la cyberintimidation?
Est-ce que vous avez ce rôle-là d'informer vos écoles, de travailler en
prévention?
M. Rock (Bruno) : On a un côté
prévention puis on a un département ou, en tout cas, des personnes qui
travaillent pour la participation parentale et communautaire, qui outillent les
communautés et les écoles dans leur accompagnement.
Puis là je ne pourrais pas vous dire si, oui ou non, on a fait des... Parce
qu'on on sort des pamphlets mensuels ou, en tout cas, au moins six, sept
fois par année, dans lequel on donne l'information aux parents. Est-ce que ça,
ça en fait partie? Je ne pourrais pas dire, là, mais définitivement que c'est
un rôle qu'on pourrait avoir.
M. Vigneault (David) : Puis je
pourrais même rajouter aussi : le CEPN, dans sa nature, répond aux
demandes des communautés. Donc, si une communauté dit : Bien, nous, on
voit un problème chez les jeunes, il y a vraiment trop d'utilisation des écrans
dans les familles, hors école, là, on prend le rôle d'aller chercher des informations, d'informer les communautés et les
parents, on peut... La façon que notre mandat est fait, on est plus
réactifs, on n'a pas le mandat d'imposer des choses, on ne peut pas imposer des
choses aux écoles. Ça fait qu'on répond juste aux demandes.
Mme Tremblay : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme la
députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Merci beaucoup. Donc,
dans la même ligne d'idées, vous pourriez être ouverts à un guide de bonnes pratiques, avec un volet pour les
familles puis un volet scolaire, qui pourrait être revu par un comité
aviseur, là, qui regroupe les 22 écoles? Pour vous, ça serait quelque
chose qui pourrait vous aider puis qui serait un bon outil?
M. Rock (Bruno) : C'est certain que
oui. Puis la particularité, je vous dirais, de tout ce genre de guides et de
politiques qui sont produits par le ou les gouvernements, là, souvent, on va
prendre ces politiques-là et ces guides-là et on va essayer d'en trouver de
diverses sources et d'ajouter notre côté premières nations. Parce que souvent,
malheureusement, les Premières Nations, tu sais, ils vont être consultés, oui,
mais souvent pour plus tard ou trop tard. Ça fait que, souvent, on veut ajouter
nos réalités pour que ça touche nos réalités dans les communautés.
M. Vigneault (David) : Puis
j'ajouterais aussi que, juste un peu avant la semaine dernière, je pense, on a
eu une rencontre avec les différentes directions des différentes écoles qui
font partie du CEPN, puis c'est une question qui nous a
été demandée, aussi, est-ce qu'on allait les aider à encadrer l'utilisation des
écrans en classe, est-ce qu'on allait... pas fournir une idée, mais comme aider
les écoles, dans le fond, à développer leur politique d'usage d'écran. Donc, ça
a été demandé, donc on va le faire.
Mme Bogemans : Superintéressant.
Autre chose. Dans le cumul des heures, parce que vous faites clairement une
démarcation entre le matériel éducatif fourni par l'école avec, bon, des
applications, des logiciels, des accès qui sont
très contrôlés, et les outils personnels, comment s'assurer que le temps
maximum par âges, finalement, soit cohérent, quand on met la
consommation personnelle à la maison des enfants? Est-ce que vous avez pensé à
un système de communication école-enfant ou est-ce que vous nous suggérez
quelque chose en ce sens-là?
M. Vigneault (David) : C'est une
excellente question, je dirais, parce que, comment... Comment, vraiment, gérer
qu'est-ce qui se passe à la maison, tu sais? On peut fournir toutes les
recommandations qu'on veut, même si les parents sont stricts. Moi, j'ai des
neveux qui ont comme 10, 12 ans, puis ils sont bien capables d'aller sur
leur tablette, passé «bed time». Ça fait que ça reste sur papier, mais, tu
sais, comme, au final, on fait le mieux qu'on peut.
Mais, dans l'optique qu'on a, on est d'avis
qu'il ne faudrait pas limiter l'utilisation des écrans dans le cadre scolaire,
quand c'est utilisé à des fins pédagogiques pertinentes. C'est sûr que, si on
parle de, je ne sais pas, moi... il y a du temps à tuer en classe, puis on
envoie tout le monde jouer sur un iPad, ce n'est pas la même chose. Mais, en
tant qu'utilisation d'outils technologiques pédagogiques, aide à
l'apprentissage, et que c'est pertinent, bien, tu sais, comment est-ce que je
dirais ça, si on regarde le portrait global, ces outils-là, dans nos
communautés, on voit... on peut constater que ça aide, ça contre le décrochage
scolaire. Puis, oui, je peux reconnaître qu'il y a des... il y a des effets sur
le développement, mais il y a encore plus d'effets quand tu décroches en
troisième année que quand tu passes quatre heures sur une tablette par jour.
Ça fait que, tu sais, «in the end», au final,
c'est ça, ça devient difficile de dire : Oh! les familles, vous ne devriez
pas faire plus que 2 h 30, parce qu'à l'école on va s'en servir
3 h 15, tu sais? Ça commence à être... c'est du cas par cas,
beaucoup. Puis je te dirais, je dirais que, plus la famille est impliquée dans
l'éducation de l'élève, de son enfant, plus les familles sont mises au courant
des recommandations, des faits, bien, plus les personnes qui ont ça à coeur
vont l'appliquer. Pour ceux que ça n'intéresse pas, on ne peut rien faire.
Mme Bogemans : Donc, vous êtes quand
même contre le temps d'écran bonbon, surprise, récompense à l'école puis les
films qui sont là pour passer du temps, là, qui ne seraient pas étudiés, par
exemple, dans un cadre culturel ou avec une plus-value, là, à l'enseignement,
là?
M. Vigneault (David) : Bien, il
faudrait que ce soit exceptionnel. Tu sais, je vous ne dirais pas, en tant
que... Ça fait 15 ans que je suis enseignant. Je ne vous dirais pas que je
ne l'ai jamais fait, là, je l'ai fait quand même, probablement, plus souvent
que je devrais, mais c'est une exception. Ça ne peut pas être la solution de
base, là.
Mme Bogemans : Parfait. Parfait.
Est-ce que j'ai le temps pour une dernière question? O.K. Parfait. Je sais que
ça sort un petit peu du contexte scolaire, là, mais les jeux vidéo et les
garçons, on en entend beaucoup parler. Vous avez eu la question, précédemment,
pour les médias sociaux, l'âge limite, mais est-ce que vous pensez qu'une
limite d'âge pour certains jeux vidéo ça ferait du sens aussi?
M. Vigneault (David) : En tant
que... en tant que gamer moi-même, bien, tu sais, ça dépend de la nature du jeu. Moi, je ne vois pas de problème à ce que mes
neveux, par exemple, jouent à des jeux où c'est un simulateur de travail
de ferme, là, tu sais? Je ne pense pas que,
qu'ils soient influencés à aller planter des patates, ça va être
nécessairement négatif. En même temps, ça va avec ce qu'on appelle, je pense,
l'ESRB, là, la suggestion d'âge pour les jeux vidéo, ça, et c'est mon avis
personnel à ce niveau-là, je pense que c'est... il n'y a pas assez de choses
qui est fait pour que ça soit renforcé. Très facile d'acheter un jeu
17 ans et plus dans un magasin, «whatever», mais, au-delà de ça... Et je
pense aussi que les jeux vidéo sont très utiles, même en contexte pédagogique.
Ça fait que ce n'est pas le jeu vidéo en tant que tel, le problème, du moins de
mon point de vue et du point de vue du travail que j'ai, ce n'est pas le jeu
vidéo qui est le problème, la mécanique du jeu vidéo qui est le problème, c'est
la façon qu'il est utilisé, le contenu qui est dedans.
Mme Bogemans : ...c'est de gérer le
bon matériel pour la bonne catégorie d'âge?
M. Vigneault (David) : C'est ça.
Mme Bogemans : O.K.
M.
Vigneault (David) : Puis, ça reste la même chose comme pour les films,
on ne peut pas empêcher une famille qui
veut que son enfant de 17 ans écoute un film d'horreur, chez eux, on ne
peut pas décider pour eux autres, forcément.
Mme Bogemans : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, M. Rock, bonjour, M. Vigneault, merci
pour votre présentation. Première question, juste une question de
précision sur ce que le député d'Hochelaga-Maisonneuve vous demandait : Donc, je comprends que, s'il y avait une directive
du ministère encadrant l'usage du cellulaire à l'école au grand complet,
donc, les 22 communautés des Premières
Nations que vous représentez ne seraient pas assujetties à une telle
directive? C'est bien ça?
Une voix : ...
Mme Cadet : O.K.,
parfait. Donc, ça répond, donc, à cette question-là. Ensuite, sur la lignée,
donc, de la collègue d'Iberville, donc, moi aussi, donc, j'ai bien noté qu'il y
avait, donc, une démarcation très claire, donc, qui était faite au niveau de l'utilisation des outils technologiques à des
fins pédagogiques et celles utilisées à des fins ludiques.
Manifestement, donc, si on parle, bon, de l'emploi, de l'usage du cellulaire à
l'école, c'est parce que les intervenants précédents qui sont venus nous voir
dénotaient une problématique ou un enjeu de l'usage des outils personnels comme le cellulaire à des fins ludiques, dans les
heures de récréation, dans les heures, donc, de pause, donc, entre les
classes et un lien moins fort entre les
élèves, les élèves étaient moins incités à bouger, à faire d'autres types
d'activités. Dans les... au niveau, donc, des institutions que vous,
vous représentez, est-ce que c'est une problématique qui a été transmise au
Conseil en éducation des Premières Nations?
• (10 heures) •
M. Rock
(Bruno) : Ce n'est pas une question qui a été vraiment soulevée. On
rencontre les directions mensuellement et virtuellement, d'ailleurs, puis ce
n'est pas une question qui a vraiment été soulevée, là. Par contre, tu sais, je
le répète, le CEPN peut être là... Tu sais, si on y va de façon plus... d'un
point de vue sensibilisation, c'est certain que, nous, ça pourra éventuellement
être un rôle, surtout que, tu sais, on constate, évidemment, que le numérique
prend de plus en plus de place, le côté numérique personnel versus académique.
Évidemment que, si on peut aider les communautés là-dedans, on le fera.
M. Vigneault
(David) : Je rajouterais aussi... J'ai enseigné, là, sur une
communauté attikamek puis je dirais que oui,
c'est une problématique, mais ça reste au niveau local de l'école. On vivait ça
à l'intérieur de l'école. Comme n'importe quelle autre école à laquelle
j'ai enseigné, ça restait au niveau local, tu sais, la direction n'emportait
pas forcément ça au CEPN pour dire : On a un problème, il faudrait faire
une politique globale. C'est du cas par cas, c'est école par école.
Puis tu sais, moi,
là, dans mon rôle, puis, même, ça rejoint ma vision personnelle, si vous me
demandez mon avis, une tablette, c'est un gros cellulaire. Ça fait que, tu
sais, la problématique est qu'il n'y a pas une éducation de faite auprès des
élèves sur le fait que ce sont des outils, ce n'est pas juste du
divertissement. Moi-même, je ne serais pas contre l'utilisation des cellulaires
en tant qu'outils dans une classe, parce que ça peut faire la même chose qu'une
tablette, mais encore faut-il que les élèves soient sensibilisés au fait que
c'est un outil, que ça sert dans tel contexte et que, chez eux, ils peuvent
bien s'en servir pour divertissement, s'ils veulent, mais présentement, quand
ils sont à l'école, c'est un outil, puis tout usage qui n'est pas en tant
qu'outil devrait être interdit, quant à moi, oui.
Mme Cadet : Puis, M. Vigneault, sans que ce soit une
problématique qui a été rapportée au CEPN, vous, comme enseignant... Puis vous dites, donc, ça... Tu
sais, vous le voyez comme dans... en fait, comme dans toutes les écoles,
tu sais, vous le voyez, là, qu'il y a cet usage de la part des élèves du...
soit du cellulaire ou de n'importe quel autre outil. Effectivement, je donnais
le cellulaire parce que c'est celui qu'on mentionne ici, qui est le plus
présent, là, auquel les jeunes ont le plus accès. Mais cet encadrement-là, tu
sais... Vous voyez une nécessité, donc, d'un encadrement au niveau de l'aspect
ludique, là, à l'école, du cellulaire ou de tout autre outil, là?
M. Vigneault
(David) : Oui. Bien, tu sais, les adolescents, dans les écoles des
Premières Nations, sont avant tout des adolescents comme les autres, ils font
la même chose que tous les autres adolescents partout au Québec et, je dirais,
quasiment au monde, ça fait que, oui, ils ont envie de communiquer avec leur
ami en dessous du bureau avec leur
cellulaire. Et ça, ça reste une question de gestion de classe et de discipline.
Pour avoir dû gérer ça... Et je me considère comme quelqu'un qui était très alerte à ça. Si je voyais un élève qui
souriait en regardant comme en dessous de son bureau, c'est louche un peu, là. Mais, tu sais, rendu là,
c'est ça, c'est une question de culture d'école, de gestion, de
discipline.
Si
on monte la question au CEPN, oui, c'est sûr qu'on va dire : Bien, on vous
incite à faire que vos règlements d'école soient logiques et structurés,
en cette fonction-là, d'encourager et de récompenser les bons comportements,
plutôt que punir les mauvais, mais, encore là, c'est ça, c'est une question de
gestion de classe, de discipline, puis, ça, toutes les écoles ont déjà tous les
outils en main pour être capables d'appliquer ça.
Mme Cadet : Vous
avez illustré, donc, les différents outils technologiques utilisés à des fins
pédagogiques, mais surtout, donc, sur le plan culturel, qui sont utilisés à
très grande échelle parmi les écoles que vous représentez. À partir de quel âge
ou de quel niveau scolaire ces outils-là sont utilisés?
M. Vigneault
(David) : Ils sont utilisés à tous les niveaux. Ce n'est pas les mêmes
outils qui sont utilisés. Ce n'est pas... Ils ne sont pas utilisés de la même
façon non plus. Ça fait que ça va, oui, en fonction de la maturité de l'élève
ou en fonction de ses capacités. Je vous dirais qu'en contexte autochtone il
n'existe pas beaucoup de matériel qui a été créé pour les communautés. Tu sais,
chaque communauté parle sa propre langue. Il n'y a pas de maisons d'édition qui
font, comme, des livres, forcément, en anichinabé ou bien en micmac. Ça
n'existe pas.
Donc,
les outils pédagogiques comme ces outils technologiques offrent la possibilité,
par exemple, dans une classe de maternelle micmaque, bien, de leur offrir une
comptine en micmac qu'ils peuvent apprendre sur des sujets pertinents pour un
enfant de cinq ans. C'est utilisé dans ce contexte-là et c'est là le bonus
qu'on voit, surtout, dans le contexte des Premières Nations, c'est que ça offre
la flexibilité ou la possibilité d'apporter le contenu culturellement
pertinent, alors qu'autrement, sans ça, ce serait difficile. Mais, c'est ça, à
chaque âge, on adapte en fonction des recommandations, oui, et des capacités de
l'élève.
Mme Cadet : Merci.
Est-ce que j'ai le temps...
La Présidente (Mme
Dionne) : Allez-y.
Mme Cadet : Oui,
peut-être, en fait, comme dernière question de mon côté, qu'est-ce que vous
souhaiteriez que nous, comme législateurs... Tu sais, vous voyez, donc, on
rencontre plusieurs intervenants. On a un rapport à remettre cet automne. Nous,
on aura à... on devra utiliser les leviers qui sont à notre disposition soit
pour légiférer ou émettre différentes directives à la population. Donc,
qu'est-ce que vous souhaiteriez que l'on retienne de votre présentation et que
l'on mette en oeuvre à travers les outils dont nous disposons?
M. Rock
(Bruno) : De retenir le côté positif des technologies et des écrans en
classe et dans leur utilisation. Si on se
met dans un contexte Premières Nations et dans un contexte où la langue est
quand même un enjeu très important, le niveau de langue, et
d'acquisition de la langue, et de maîtrise de la langue n'est pas le même dans
les 22 communautés, puis c'est... les outils technologiques représentent
vraiment... sont vraiment importants.
Un exemple ici que
j'ai, entre autres, au niveau de la nation Wolastoqiyik, anciennement malécite,
ils ont développé un outil, là, un outil trilingue,
français-anglais-wolastoqey, pour le développement de la langue et de la
culture. Du côté des Anichinabés, également, ils ont fait des outils
d'exploration et de comparaison des langues. Au niveau Attikamek, il y a un
dictionnaire qui est bilingue, français-atikamekw. Du côté Mohawk, également,
ou Kanien'kehà:ka, il y a un répertoire de leçons et de ressources pour
l'apprentissage.
Donc, définitivement
que, pour nous, c'est un levier pour aller chercher... pour aller faire
ressortir l'importance de la langue puis
améliorer la maîtrise de la langue non seulement pour les enfants et les
élèves, mais aussi pour les adultes,
les enseignants, pour qu'ils soient vraiment au fait des réalités vraiment
vécues dans les communautés. Donc, c'est vraiment ce qu'on voudrait que
vous reteniez.
Également, on parle
beaucoup du territoire. On parle beaucoup du territoire, des aînés également.
Une façon facile d'aller interroger, d'aller
recueillir des données et des témoignages de nos aînés, tu prends un iPad, tu
le filmes, et, comme ça, évidemment que c'est quelque chose qui va
rester, et tu l'utilises en classe comme outil pédagogique. C'est vraiment
super. Ça se fait.
Puis d'ailleurs je
fais une parenthèse sur... Vous avez tous et toutes reçu une carte avec un code
QR, puis j'ai vu quelques personnes scanner ce code-là. C'est un outil qui a
été développé par le CEPN, puis je vous dirais que c'est le... Les clients
premiers, c'était vraiment les enseignants des écoles provinciales parce que ça
a été, entre autres, financé par le
provincial, mais c'était... c'est vraiment aussi universel. Qu'est-ce qu'on a
dans ce site-là? C'est vraiment des
informations sur les nations, les 11 nations au Québec, toutes les
communautés au Québec. Si un enseignant du Québec veut en savoir plus,
on va sur le site, et il va avoir toutes les informations, mais évidemment que,
pour les enseignants autochtones aussi, étant donné que c'est quand même
11 particularités, 11 langues, 11 cultures, c'est facile d'aller
s'informer sur ce site-là. Donc, on vous encourage d'aller voir ça. C'est
vraiment un superoutil.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci.
M. Vigneault (David) : Et peut-être aussi de mon
côté, si... parce qu'en n'étant pas soumis aux réglementations
provinciales le CEPN peut aller vraiment là où les écoles veulent aller. Ça
fait qu'on peut développer des choses en marge
de ça. On peut expérimenter puis voir... Et, vraiment, dans le cadre de mon
travail, ce que je pense qui devrait être retenu et qui s'applique, peu importe la culture, peu importe l'endroit,
c'est que les outils technologiques, l'important, c'est l'encadrement et
l'utilisation, et ça passe par la formation aux enseignants à les utiliser,
parce que, bien, je vais passer un message en même temps, il y a une pénurie
d'enseignants présentement. C'est sûr que, si mon garagiste devient enseignant
de secondaire V demain, ça se peut qu'il prenne des iPad parce qu'il ne
sait pas quoi faire. Ça fait que, tu sais,
ça passe par la formation. Ça passe... donner des formations supplémentaires.
Quand on a des outils, il faut être
sûr que le personnel sache comment s'en servir parce que, sinon, ça ne donne
rien. Ça fait que plus les enseignants vont être aptes et formés à
utiliser ces outils-là, plus ils vont être en mesure de les utiliser de la
bonne façon.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci. M. le député de Gaspé.
M.
Sainte-Croix : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Merci de
vous prêter à l'exercice. C'est très apprécié.
Vous nous avez tracé
un portrait, somme toute, très positif, favorable à l'usage du numérique en
termes... dans vos contextes pédagogiques et éducatifs. Vous n'êtes pas sans
savoir qu'il n'y a pas vraiment un consensus scientifique sur la plus-value,
disons ça comme ça, mais je comprends, dans votre exposé, que, suivant le
contexte dans lequel vous vivez, en termes de territoire,
en termes aussi d'un point de vue culturel, donc l'accès à votre culture, il y
a là, manifestement, quand on vous écoute, une plus-value indéniable au niveau
de se réapproprier la culture à travers les contextes pédagogiques.
Est-ce
que vous voyez... Puis je comprends aussi que c'est assez, quand même,
généralisé dans votre contexte scolaire. En tout cas, vous en faites une
pratique qui me semble être très présente. Est-ce que vous voyez, a contrario, là, parce que c'est beaucoup ce qu'on se fait dire
aussi de par plusieurs spécialistes, l'effet plus négatif à travers
l'évolution de nos jeunes, à travers l'isolement, à travers la difficulté de
socialiser, à travers une utilisation, comment vous dire, je ne dirai pas
exagérée, mais très présente à travers, bon, les pauses, les récréations, les
périodes de lunch. Bref, les jeunes sont très portés sur leurs appareils, et il
y a une question, là, d'entrer en communication avec l'autre qui disparaît
tranquillement, pas vite. Est-ce que vous vivez ça dans vos communautés aussi?
Comment vous réagissez à ça? Puis quelles seraient vos recommandations
là-dessus dans les contextes qui sont les vôtres, là, j'insiste, là, tu sais,
en fonction de vos réalités?
• (10 h 10) •
M. Vigneault
(David) : Bien, moi, je vais vous dire, je travaille au CEPN, mais je
ne suis pas un autochtone. Je viens des Îles-de-la-Madeleine. La majorité de ma
carrière était dans des écoles soit provinciales au Québec ou provinciales
ailleurs. Puis les propos que je tiens là, à moins que si je dis spécifiquement
qu'il y a un contexte culturel, ça s'applique partout où est-ce que j'ai
travaillé.
Donc, oui, ce qui se
passe dans les écoles, où les élèves vont souvent être, aux pauses, tournés
vers leurs appareils, ça se passe partout, puis c'est une problématique humaine
plus que culturelle. À ce moment-là, comme je disais
tantôt, c'est une question aussi d'éducation à qu'est-ce que ces outils-là...
puis, je vais le dire bien franchement, ce n'est pas une éducation qui
devrait être limitée aux élèves. Je vois des gens de mon âge et plus vieux qui
font une bien pire utilisation des outils technologiques que les élèves que je
vois. Tu sais, j'ai moins de misère avec quelqu'un qui joue à... qui regarde Cocomelon
que quelqu'un qui perd 3 000 $
à Candy Crush, par exemple.
Ça fait que, tu sais,
je pense, c'est un problème sociétal, rendu là, de société, et il y a une éducation
générale à faire là-dessus. Les jeunes sont influencés par leur environnement.
Je pense que, si les adultes utilisaient mieux ces outils-là, ça se refléterait
sur les jeunes aussi. Puis le rôle de l'école là-dedans, dans notre contexte et
dans le contexte de l'école, ça revient à un contexte de discipline aussi,
d'utiliser ça adéquatement. On pourrait débattre de n'importe quel autre outil
qui existe, puis je peux vous trouver des listes infinies de manières négatives
d'utiliser un marteau ou un livre, puis je peux bien vous dire aussi qu'un
livre incite à la sédentarité parce que tu ne cours pas quand tu lis, mais, tu
sais, ça revient... C'est des exemples imagés, mais ça revient au fait que tout
est... plus on fait la promotion de l'utilisage pédagogique sensée dans un
contexte logique... Puis, tu sais, quand je parle de contexte culturel, même
quand j'enseignais aux Îles-de-la-Madeleine, on se servait de ça pour adapter
les exemples qu'on avait puis qui ne correspondaient pas à nos réalités, à ce que
mes jeunes dans ma classe, là, vivaient, et je faisais la même chose en
contexte autochtone. J'adaptais les exemples dans les livres qui
correspondaient zéro à la réalité. Je me servais des outils pour que ça
rejoigne la réalité. Ça fait que, grosso modo, c'est juste par l'utilisation
adéquate qu'on...
M. Rock
(Bruno) : C'est ça, pour répondre encore plus à la question, oui,
c'est un problème dans nos écoles. Puis
d'ailleurs je reviens avec le côté de la sensibilisation... est important, et
de l'éducation. Puis, tu sais, on est tellement au fait de cette problématique-là, de cet enjeu-là
que le CEPN, voyant ça, il y a quelques années, une quinzaine d'années,
on a développé, et monté, et mis de l'avant les jeux interscolaires des
Premières Nations. Donc, chaque mois de mai, à l'Université Laval, il y a les
jeux interscolaires. Donc, on rassemble toutes les écoles qui peuvent aller
pratiquer des épreuves sportives, athlétisme, etc. Donc, ça, c'est vraiment le
côté sensibilisation qu'on pourrait amener.
M. Sainte-Croix :
Je comprends que le pont entre l'école et la communauté, au même titre que
le pont entre une école d'un centre de services scolaire et d'un village, c'est
aussi, chez vous, des réalités qu'on va devoir tenir en compte pour la
sensibilisation, l'éducation à des bonnes pratiques, dans le fond, c'est ce
qu'on cherche.
M. Rock
(Bruno) : Tout à fait. Puis, tu sais, c'est sûr que le côté, là... On
parle de parents beaucoup, mais le côté communauté de nos communautés, sans
dire qu'il est plus fort, bien, c'est quelque chose de particulier, de très,
très présent, là, dans nos communautés, oui.
M. Sainte-Croix :
Merci beaucoup.
La Présidente
(Mme Dionne) : Merci. M. le député, oui, il reste
20 secondes si vous voulez poser votre question.
M. Leduc :
...le terme «autochtonisation de
l'apprentissage». Pouvez-vous nous expliquer ce que ça veut dire?
M. Rock
(Bruno) : L'autochtonisation, c'est comment amener l'école formelle et
en rang d'oignons dehors ou en territoire. Ça, c'en est un exemple. Ce n'est
pas que ça, mais c'est vraiment de rendre les apprentissages signifiants, qui
se rapprochent de la culture des jeunes.
M. Leduc :
Merci beaucoup.
La Présidente
(Mme Dionne) : Alors, M. Rock, M. Vigneault, merci
infiniment pour votre contribution à ces travaux.
Pour ma part, je suspends quelques instants pour
accueillir nos prochains témoins. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 16)
(Reprise à 10 h 20)
La Présidente (Mme Dionne) : La commission
reprend maintenant ses travaux. Donc, je souhaite la bienvenue aux Drs Giroux,
Pouliot et Dion. Alors, bienvenue. Alors, Mme Marie-Ève... M. Patrick
Giroux, pardon, qui est chercheur associé, Mme Marie-Eve Pouliot,
professeure titulaire en travail social, et Mme Jacinthe Dion, professeure
titulaire et psychologue, donc, bienvenue à cette commission. Je vous rappelle
que vous avez 10 minutes pour nous présenter vos commentaires, et, par la
suite, on procédera à une période d'échange avec l'ensemble des membres de la
commission. Alors, la parole est à vous.
M. Patrick Giroux
et Mmes Eve Pouliot et Jacinthe Dion
M. Giroux (Patrick) : Bonjour.
Essentiellement, le mémoire qu'on vous a déposé avait deux grandes parties. En
première partie, on voulait vous... on voulait insister sur le fait qu'il y a
déjà beaucoup de choses à l'école qui se font et que c'est complexe à intégrer,
le numérique, que ça prend de la formation, et qu'on ne peut pas s'improviser
ou improviser des changements comme ça à l'école. Il faut que ce soit réfléchi.
On voulait mettre l'accent aussi sur le fait
qu'avec l'expérience acquise depuis des années, entre autres, durant la période
de COVID, nos enseignants sont devenus très bons techniquement, mais aussi de
plus en plus critiques. Puis ce qu'on voit se dégager dans nos recherches,
entre autres, c'est que ce n'est plus à l'école, le problème des écrans. La
dernière recherche que j'ai faite, c'était dans une école tablette où les gens
ont une tablette, chacun leur tablette, puis, durant la journée, là, les usages
pédagogiques de la tablette, ça représente en moyenne 38 minutes, alors
qu'à la maison les usages pédagogiques, c'est 60 minutes, puis on ne parle
même pas des usages qui sont plutôt de l'ordre du divertissement, qui sont
beaucoup, beaucoup, beaucoup au-dessus de ça.
Donc, la première conclusion qu'on voulait
partager avec vous c'est que le temps-écran à l'école, il est de plus en plus
sous contrôle. Il y a beaucoup de personnes qui y travaillent. Les enseignants
sont appuyés, sont déjà encadrés par plusieurs documents. Selon nous, ce qu'on
vous propose, c'est de vous concentrer sur les parents. Les parents ont besoin
de beaucoup, beaucoup d'aide. Ils ont besoin d'assistance, ils ont besoin de
formation et ils ont besoin d'information. Donc, la deuxième partie de notre
propos, ça va être là-dessus. Mais, juste avant, si jamais vous voulez aider l'école, je pense qu'il y a deux
choses que vous pourriez faire, ou recommander, ou suggérer, comme on
l'a écrit. D'abord, c'est de rendre obligatoire l'évaluation de la compétence
numérique. Actuellement, même s'il y a un peu de compétence numérique puis il y
a un peu d'éléments liés à la santé numérique et aux écrans dans le programme
de CCQ, en gros, pour l'école, pour les enseignants, le numérique, c'est une
compétence transversale.
Puis là, on va se le dire, quand c'est la
responsabilité de tous, il n'y a personne qui s'en occupe. Ce qui se passe,
c'est qu'on reçoit des jeunes à l'université... Par exemple, en première année,
là, nous, on reçoit des jeunes à l'université. Il y en a qui réussissent à
faire tout leur cheminement scolaire sans développer pratiquement aucune
compétence par rapport au numérique, sauf que la réalité, c'est qu'à
l'université les profs, ils ont des attentes. Le milieu du travail, quand il
arrive, le milieu du travail a des attentes.
Ça fait que, là, on se retrouve avec une très,
très grosse hétérogénéité, puis elle est, entre autres, due à ça, c'est qu'il y
a beaucoup de monde responsable, mais il n'y a personne qui est obligé
d'évaluer. Ce qu'on suggère, c'est qu'il y ait au moins quelques moments clés,
dans le cheminement au primaire ou au secondaire, où la compétence serait
évaluée pour peut-être responsabiliser encore plus les acteurs scolaires, leur
forcer un petit peu la main. Évidemment, ça veut dire que ça va prendre du
temps. Ça va peut-être être dur pour les enseignants, mais je pense qu'on est
encore capables de le faire.
La deuxième
chose, c'est que, si on veut que les enseignants aient plus de facilité encore
à intégrer le numérique, je vous
suggère fortement et je vous recommande l'élaboration puis la diffusion d'une
progression des apprentissages officiels. L'idée, c'est que, pour tous les programmes, pour toutes les
disciplines, les enseignants, ils ont un document qui décrit : En
première année, en deuxième année, en troisième année, voici les apprentissages
qu'on doit faire. C'est tout simple, mais c'est superimportant pour les
enseignants parce que ça leur permet de se structurer puis de s'organiser à
l'intérieur d'une école, à l'intérieur d'une équipe d'enseignants, à
l'intérieur d'un CSS. Ça leur permet de s'organiser puis de se structurer plus
facilement pour être certains qu'à la sortie du secondaire les jeunes ont
atteint un niveau x. Actuellement, ça, on ne l'a pas. Ça fait que, dans
certaines écoles, le niveau de compétence technique puis le niveau de
compétence numérique général est très, très élevé, alors que, dans d'autres, il
est un petit peu plus bas.
Donc, si on veut aider l'école encore, je pense,
c'est les deux choses qu'on pourrait faire, mais j'attire encore votre attention sur la première conclusion que
j'ai partagée. Je pense que ce n'est pas à l'école que vous devriez
mettre le plus de vos énergies. Les parents sont très, très, très importants,
puis actuellement on ne les supporte pas beaucoup.
Mme Pouliot (Eve) : Pour poursuivre
sur cette idée-là, on pense effectivement que la solution, elle ne se retrouve
pas tant à l'école, que les solutions sont déjà en place, en fait, en milieu
scolaire, mais que, dans le milieu extrascolaire, il y a
des choses à faire, puis que les parents ont vraiment un rôle central à jouer
au niveau de l'usage des écrans chez les jeunes. On a fait une revue
systématique des écrits scientifiques, là, récemment, notamment sur les
facteurs familiaux qui sont liés aux inégalités numériques, puis il y a quatre
grands facteurs, en fait, là, qui se dégagent de cette revue systématique là.
Le premier,
bien, c'est l'accès à des bons outils numériques dans le milieu familial. Donc,
ça, c'est fondamental. Puis on sait, les études nous le démontrent, là,
qu'il y a vraiment des écarts encore aujourd'hui, notamment entre les milieux urbains, les milieux ruraux, les milieux
qui sont favorisés et les milieux qui le sont moins. Donc, on sait qu'il
y a des choses à mettre de l'avant pour solutionner ces écarts-là, les
diminuer.
Ensuite, il y a toute la question du niveau de
littéracie ou de compétence numérique chez les parents qui est à travailler
parce qu'on sait que, si les parents n'ont pas de connaissance, de compétence
au niveau des technologies numériques, bien, ils peuvent difficilement
accompagner leurs enfants là-dedans. Donc, c'est un autre élément ou un autre défi, en fait, là, qu'on doit relever pour
mieux outiller les parents puis faire en sorte qu'ils soient plus
connaissants, plus compétents, dans le fond, dans leur usage du numérique pour
accompagner mieux leurs jeunes à cet égard-là.
Il y a aussi toute la question des attitudes des
parents envers le numérique, et ça, vraiment, dans le contexte pandémique, ça
s'est accentué, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup d'ambivalence qui est vécue
chez les parents. Les parents, d'une part,
bien, reconnaissent que les outils numériques, c'est incontournable de nos
jours, les jeunes en ont besoin, en ont besoin pour apprendre, en ont
besoin pour socialiser, mais, d'autre part, ils s'inquiètent aussi beaucoup sur
l'impact que les écrans peuvent avoir dans la vie de leurs jeunes au niveau de
la santé physique, de la santé mentale. On en parle beaucoup, et ça génère
beaucoup de culpabilité chez les parents, beaucoup de stress aussi, et ça fait
en sorte, ce stress-là, souvent, bien, qu'on va aussi laisser nos enfants
utiliser les tablettes, les outils numériques, parce qu'on est stressés, on a
des choses à faire, puis on va les laisser, des fois, sans beaucoup de
supervision, là, utiliser ces outils-là. Donc, il y a vraiment quelque chose à
faire au niveau des attitudes des parents envers le numérique pour les
sensibiliser, pour mieux les accompagner, les outiller à cet égard-là pour
qu'ils soient aussi plus conscients de certains risques puis aussi réduire
certains stress qui peuvent être associés, là, au numérique.
Finalement, il y a toute la disponibilité des
parents pour accompagner leurs jeunes. Donc, on sait que, dans le contexte de
la pandémie, c'est quelque chose qui a été un enjeu important pour les
travailleurs dans les services essentiels, mais aussi pour les parents en
télétravail, puis ça se poursuit encore aujourd'hui. Donc, les parents qui sont
peu disponibles pour accompagner leurs enfants, bien, ça fait en sorte que les
enfants se retrouvent un peu seuls avec ces outils-là, et là ça peut amener des
usages qui sont plus dangereux ou nocifs, là, pour les jeunes.
Donc, tous ces facteurs-là qui viennent, en
fait, creuser, là, les inégalités dans le milieu familial, bien, ils sont à
considérer dans les solutions qu'on met en place puis dans les outils qu'on
développe aussi pour que les parents accompagnent mieux leurs enfants. Et ces
défis-là, en fait, ils vont aussi influencer les pratiques parentales, parce
que, les enfants, ils apprennent en regardant aussi comment leurs parents
agissent.
Donc, il y a vraiment le phénomène, en ce
moment, beaucoup, dont on entend parler, de technoférence. C'est-à-dire que les
parents sont préoccupés avec leurs cellulaires, avec leurs outils numériques,
sont moins présents pour les enfants, puis ça engendre des difficultés au
niveau familial, au niveau de la qualité des relations, entre autres. Et on
sait que les parents, bien, sont très importants dans la médiation par rapport
au numérique, donc, médiation qui peut être active, donc, accompagner l'enfant
dans l'appropriation des outils numériques, ou restrictive, donc, mettre des
règles. Donc, on sait que les parents, peu importe le type de médiation qu'ils
vont utiliser, bien, c'est mieux d'en utiliser que d'être vraiment dans le
laxisme et ne pas en faire. Donc, on doit outiller les parents aussi à cet
égard-là pour qu'ils puissent mieux accompagner leurs enfants.
Et là, bien, je vais laisser la parole à ma
collègue pour des pistes plus concrètes.
Mme Dion (Jacinthe) : Oui. Donc,
bien, il y aurait cinq recommandations qu'on suggère, nous. En fait, d'abord,
avant d'outiller les parents, ça serait important de vraiment s'assurer de
diminuer les inégalités relatives aux écrans.
Ce n'est pas toutes les familles qui ont des sous, de l'argent pour pouvoir
avoir des équipements informatiques adéquats. Puis on sait qu'Internet
haute vitesse n'est pas encore disponible partout dans le Québec, là. Nous, on
le sait, on habite en région, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, puis y a des coins,
comme Sainte-Rose-du-Nord, où il n'y a même pas Internet dans certains
endroits. Donc, d'abord, avant de s'attaquer à aider les familles, il faut
s'arranger pour diminuer les inégalités pour l'accès au numérique.
Donc, une fois que ça, c'est réglé, là, bien, on
souhaite que ce soit réglé, bien là on va aider les parents à développer leurs
compétences parce que, malheureusement, ça change vite, donc, tout ce qui
concerne maintenant l'intelligence
artificielle, comment on peut former adéquatement nos parents. Donc, on sait
que les écoles sont proches des parents, les bibliothèques, les centres
communautaires. Donc, peut-être qu'on pourrait outiller ces endroits-là que les parents fréquentent pour pouvoir les aider à
développer des habiletés numériques, puis des campagnes publicitaires,
des campagnes de sensibilisation à grande échelle, au Québec, pour sensibiliser
ces parents-là, mais ce n'est pas seulement de les sensibiliser à développer
plus de compétences numériques, mais il faut aussi les aider à pouvoir encadrer
leurs enfants.
On le sait, je le sais, j'ai des ados à la
maison, ce n'est pas facile. Puis c'est facile de jeter l'éponge parce qu'à un
moment donné, les enfants, ils veulent toujours être devant leur écran. Donc,
de mettre un nombre d'heures par jour, mais pas juste en termes d'heures, puis
de limiter le nombre d'écrans, mais aussi le contenu de ce qui est vu... Je
fais des recherches auprès des adolescents, puis, juste pour vous donner un
exemple, on sait que, dès 11 ans, même avant, là, mais, en moyenne, à
partir de 11 ans, les jeunes ont déjà vu de la pornographie sur Internet à
11 ans, donc, puis il y en a qui vont regarder à chaque semaine de la
pornographie sur Internet. Toute la question de la cyberintimidation,
des leurres qui peuvent se passer sur Internet, c'est grave. Donc, il faut
s'assurer d'outiller les parents à pouvoir s'occuper de leurs enfants pour
s'assurer qu'ils ne vont pas voir ces contenus-là qui devraient être réservés
aux adultes et...
• (10 h 30) •
La Présidente (Mme Dionne) : Votre
temps est malheureusement écoulé.
Mme Dion (Jacinthe) : O.K., parfait.
La Présidente (Mme Dionne) : Mais,
rapidement, est-ce qu'il y a consentement pour que vous fassiez rapidement la
nomenclature de vos recommandations, puis on pourra passer à la période
d'échange?
Des voix : ...
Mme Dion (Jacinthe) : Parfait, il me
reste peut-être 30 secondes, merci. En fait... Puis, ensuite de ça, ça
serait de sensibiliser... bon, j'indiquais ce que leurs enfants regardent, mais
de s'intéresser aux enjeux. Toutes les données qui sont enregistrées dans des
sites Internet, des applications, toutes les publicités qui ont... qui sont là
pendant que nos enfants jouent à des jeux, ça aussi, c'est quelque chose que,
si on pouvait encadrer ça également...
Puis, dernièrement, comme dernière
recommandation, bien, les parents, qui sont au coeur de ça, bien, je pense
qu'il faudrait les consulter pour identifier c'est quoi, leurs besoins, quelles
solutions ils ont besoin puis de quelle façon on doit implanter ces
solutions-là pour qu'ils les utilisent, parce qu'on a bien beau dire que ce
n'est pas plus que tant d'heures par jour, mais, si on n'a rien à leur offrir
en échange ou des outils pour les aider, bien, ils vont être encore mal pris
par la suite. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Donc, je vais donner le privilège à M. le député de Jonquière pour entamer
cette discussion.
M. Gagnon : Ah bien! Merci, Mme la
Présidente. J'en profite pour saluer tout le monde qui a traversé la réserve faunique
des Laurentides pour arriver ce matin, Dr Giroux, tout le monde, un plaisir
d'avoir du monde de chez nous — c'était mon petit cinq secondes chauvin — l'Université
du Québec à Chicoutimi.
Bon, je m'y ramène, je m'y ramène, deux phrases
fortes, là. Il y a beaucoup d'information dans le mémoire, mais... puis on l'a
entendu depuis 48 heures, là, cinq heures... Vous dites, dans le
rapport... dans le mémoire, pardon, cinq heures et plus par jour, en dehors du
contexte scolaire, amènent vraiment des réductions des compétences sociales.
Encore une fois, dans votre rapport, on voit que vous ramenez l'impact à la
maison.
Vous dites
également... M. Giroux le mentionnait, vous nous recommandez de mettre des
énergies ailleurs que dans les écoles
du Québec, davantage de mettre nos énergies sur la formation puis le soutien de
nos familles. Encore une fois, vous
mentionnez haut et fort que l'impact est à la maison. Vous mentionnez aussi que
nos enseignants au Québec ont une formation initiale d'enseignants, puis
il y a beaucoup d'outils techniques qui viennent avec nos enseignants.
Moi, ma question est un peu crue, mais je la
pose, en formation des enseignants. Quand un enseignant, au Québec, termine son
bac, comme à l'Université du Québec à Chicoutimi, il a quoi, comme formation et
compétence, pour enseigner à nos jeunes avec
les outils pédagogiques que vous mentionnez, M. Giroux? Est-ce que c'est
l'ensemble de nos professeurs qui sortent avec un bagage ou on doit
davantage... Si vous dites : L'énergie doit être mise sur les... à la
maison, parce que, dans le milieu scolaire, on pense qu'on gère bien cet
outil-là. Mais c'est quoi, la formation qu'ont nos enseignants?
M. Giroux (Patrick) : Il faut
savoir d'abord que... Là, on va parler des enseignants qui sortent avec un bac
de quatre ans, O.K.? C'est impossible de faire ce dont je vais parler avec
moins de ça, là, moins que ça. Il faut savoir que la formation des enseignants
est régie, elle est encadrée. Il y a un référentiel de compétences. Tous nos
enseignants doivent développer un certain nombre de compétences. Le
référentiel, là, a été mis à jour il y a quelques années seulement, puis la
compétence numérique, c'est une de ces compétences-là.
Donc, jusqu'à il y a tout récemment, il y avait
des gens qui s'occupaient... un organisme qui s'occupait de vérifier ce qui se
passait dans les bacs, et tous les baccalauréats en enseignement étaient
obligés de travailler au développement de la compétence numérique. Ça pouvait
prendre plusieurs formes. Je vais parler de ce qui se fait chez nous, mais ça
ressemble à ce qui se fait dans d'autres universités, là. Je ne peux pas parler
pour les autres universités. Chez nous, par exemple, les étudiants, ils ont
trois cours durant leur cheminement, ils ont trois cours de techno, où ils
entendent parler... Bien, actuellement, je donne un cours sur les IA, sur les
algorithmes et les réseaux sociaux. Donc, on parle des IA, on parle des réseaux
sociaux, on parle du temps-écran, nécessairement, on parle de comment ça peut
les aider à leur formation continue. Mais avant, ils ont eu des cours sur les
outils qui permettaient d'aider à l'enseignement et l'apprentissage du
français, des maths, des sciences.
Ça, c'est une chose. Les cours de techno, c'est
une chose, mais on a adopté une approche programme qui fait qu'on est
globalement, tous les enseignants, responsables de toutes les compétences. Ça,
ça veut dire que mes collègues, par exemple, en évaluation des apprentissages,
la semaine prochaine, les étudiants, ils vont travailler, puis, la semaine
prochaine, pendant quelques semaines, ils vont travailler sur comment
l'intelligence artificielle, aujourd'hui, peut aider à préparer du matériel
d'évaluation, puis dans quelle mesure il faut mettre un cadre, puis dans quelle
mesure on peut s'y fier, etc.
La même chose est vraie
par rapport à la gestion de classe. La question des écrans, bon, il y a eu un
décret ministériel, mais avant c'était déjà un défi. Bien, en gestion de
classe, on parlait déjà de comment les écrans... Quand ils vont en stage, ils
vont en stage quatre fois durant leur formation. Bien, la compétence prend
un... La compétence numérique, elle est évaluée à tous les stages. Donc, autant
dans les cours de didactique, que dans les cours de gestion de classe, que dans
les cours d'évaluation, ils entendent parler de comment on peut utiliser le
numérique pour enseigner le français, comment on peut utiliser le numérique
pour enseigner les multiplications en mathématiques, comment... Puis ils en
parlent en gestion de classe, puis ils en parlent en évaluation, puis ils en
parlent en stage. On leur en parle, puis on leur donne des rétroactions, puis
ils ont des cours sur le numérique. Donc, nous, on a adopté une approche programme. On est tous responsables
de cette compétence-là. Ça fait qu'ils en entendent parler. Il n'y a
pas... Ce n'est pas une session puis, après ça, c'est fini, là. Ils en
entendent parler toutes les sessions, de la première à la dernière session,
pendant quatre ans.
Puis, à ma connaissance, c'est une recette un
peu similaire dans tous les bacs. Dans les autres universités, encore une fois,
je ne veux pas parler pour eux, je sais que j'ai des collègues où il n'y a pas
de cours de techno, mais, par contre, ils ont adopté une approche programme
puis il y a de la techno dans tous les cours ou dans... À toutes les sessions, il y a quelque chose. J'ai vu des
collègues qui avaient des cours d'intégration des connaissances. Donc, il y
avait un cours qui était réservé, à chaque session, à intégrer, rassembler
toutes les connaissances de la session dans la pratique enseignante, puis ça
inclut le numérique. Donc... Mais les enseignants qui sont formés pendant
quatre ans, normalement, sortent.
Puis l'autre
chose qui est très, très importante par rapport au numérique, puis je l'ai
mentionné dans le mémoire, c'est que, tous nos enseignants qui sortent
de notre bac, on met beaucoup, beaucoup d'emphase sur les approches réflexives puis les approches critiques. On leur
apprend... Quand ils sortent, on le sait, qu'ils ne sont pas parfaits,
puis on leur dit : Vous allez apprendre
toute votre carrière. Puis on les aide à développer les outils pour continuer à
apprendre.
Par exemple, le cours que je donne cette
session-ci, c'est le dernier cours en numérique. Bien, on va entre autres voir
comment les réseaux sociaux peuvent servir à se construire un EAP, un
environnement d'apprentissage personnalisé, pour qu'ils puissent apprendre que
c'est autre chose que TikTok. Il y a moyen d'utiliser les réseaux sociaux pour
se créer un réseau professionnel où ils vont pouvoir avoir de l'aide, ils vont
pouvoir émettre des commentaires, poser des questions, recevoir des idées,
etc., pouvoir continuer à réfléchir puis à s'améliorer, entre autres, par
rapport au numérique.
Ça fait que cette approche critique là, cette
approche réflexive là qu'on déploie tout au long du bac puis qu'on encourage
nos étudiants à adopter puis à acquérir durant tout leur bac, durant tous leurs
stages — ils
ont toujours des rapports critiques, des rapports réflexifs à faire — bien
ça, ça contribue, entre autres, à leur préparation. Puis c'est pour ça qu'on a
confiance que nos étudiants... Ajoutez à ça le réseau des Récit qui continue de
les soutenir, ajoutez à ça tous les programmes, ajoutez à ça toutes les
formations continues qui sont offertes, puis je pense que notre... nos
enseignants, on a déjà une bonne base. Est-ce que c'est parfait? Non, mais on a
déjà une bonne base. Puis c'est dans ce contexte-là qu'on vous dit : Je
pense que, là, c'est le temps de s'occuper des familles.
M. Gagnon : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme la
députée de Hull.
Mme Tremblay : Alors, bonjour. Moi,
j'ai été enseignante pendant de nombreuses, nombreuses années. Et, bon, ça,
vous avez totalement raison que, quand ça fait partie des compétences
transversales, bien, souvent, là, c'est un petit peu plus loin dans les
priorités d'évaluation. Écoute, les choses à faire sont nombreuses dans une
classe, et puis c'est très chargé aussi, les contenus éducatifs, de sorte que
la compétence transversale, bien... Ça ne veut pas dire qu'on n'intègre pas les
technologies, au contraire, mais c'est vrai que l'évaluation en tant que telle,
elle est loin de la première priorité, évidemment.
Vous, vous avez parlé d'une progression, là, des
apprentissages, là. Le cadre de référence, il existe, là, tout est bien établi,
mais évidemment, vous, ce que vous souhaitez, c'est dire : Bien, à la fin,
par exemple, du premier cycle du primaire, voici les compétences qui devraient
être plus... qui devraient être touchées, un peu comme il se fait en sciences
puis en mathématiques. On a tous des progressions d'apprentissage. J'imagine
que c'est vers ça que vous voudriez tendre puis de faire en sorte que,
vraiment, il y ait des évaluations à chacun des cycles jusqu'à la fin du
secondaire, finalement?
M. Giroux (Patrick) : Exactement. En
fait, il faut savoir... tu sais, je vous le propose et je vous le recommande,
il faut savoir qu'il y a quelques années, dans un rapport qu'on a donné au
ministère sur les laboratoires créatifs, on s'intéressait aux laboratoires
créatifs à ce moment-là, déjà, on avait rapporté que les enseignants le
réclamaient. Il faut savoir qu'il y a plusieurs écoles primaires, secondaires
qui se sont déjà dotées de tels cadres non officiels parce que les enseignants
n'étaient pas capables de s'organiser. C'est difficile, par exemple... Vous
étiez au primaire ou secondaire?
• (10 h 40) •
Mme Tremblay : ...écoles
secondaires.
M. Giroux (Patrick) : O.K.
Imaginez-vous que vous êtes en secondaire III, vous voulez monter un
programme avec, je ne sais pas, moi, de la réalité virtuelle, et puis vous ne
savez pas qu'est-ce qu'ils ont vu, dans les... en
secondaire I et II. Vous n'avez aucune idée s'ils ont les outils pour être
capables de mobiliser la réalité virtuelle pour atteindre vos intentions
pédagogiques, pour atteindre vos objectifs disciplinaires. Ça complexifie
l'intégration du numérique énormément. Puis ce qu'on voit actuellement dans le
milieu, c'est les enseignants d'une équipe-école qui se rassemblent puis qui
disent : O.K., en première année, là, moi, je vais faire ça, ça, ça. En
deuxième année, ils disent : Moi, je vais construire sur ce que tu as fait
puis je vais ajouter ça. En troisième, il dit : Moi, je vais utiliser tout
ce que vous avez fait, mais je vais plutôt aller de ce côté-là puis je vais
introduire, mettons, la robotique pédagogique. Ça fait que, là, en quatrième
année, là, il regarde ce que ses collègues, ils ont dit : O.K., bien, moi,
je pourrais utiliser ça, ça puis ça, mais il y a telle partie, là, moi, la
robotique pédagogique, je vais aller plus loin, moi, ce qui m'intéresse en
sciences, on va faire de la programmation, ça fait que je vais développer cet
aspect-là, programmation par objets... avec des objets, par exemple.
Ça fait les enseignants, à partir du moment où
ils ont cette progression-là, ils sont plus facilement capables de réfléchir à
comment je peux mobiliser le numérique pour ma discipline. Parce que, le
numérique, on n'arrête pas de dire à nos enseignants : Essayez de
l'utiliser pour faire d'autres choses, c'est une compétence transversale, puis
idéalement, il ne devrait pas trop vous gober de temps, mais il devrait
faciliter les apprentissages tout en apprenant le numérique. Mais là, si tu
n'as pas de programme, si tu es toujours obligé de recommencer à zéro, bien, ce
n'est pas le cas, c'est très lourd pour les enseignants. Et je comprends tout à
fait que, des fois, les enseignants, ils jettent l'éponge puis qu'ils
disent : Regarde, je vais me concentrer sur mes mathématiques, ou sur mon
français, ou sur mon univers social, sinon, ce serait trop compliqué. Donc,
c'est cette structure-là que je pense qu'il faut amener.
Mme Tremblay : Il y a des
intervenants qui sont venus, là, avant vous puis qui ont dit que, quand on fait
le choix d'utiliser un logiciel, d'utiliser les outils, là, ils sont venus nous
dire qu'eux, il faut absolument que ça ait une plus-value, notamment plus au
primaire, même, je vous dirais, là, que, si, dans le cas contraire, l'outil
utilisé, par exemple Netmath, là, puis il y a différents logiciels, si ça n'a
pas de plus-value, là, que ça n'apporte pas quelque chose que l'élève serait
capable de faire autrement, bien, pour eux, ce n'est pas utile de l'utiliser.
Même qu'il y en a qui sont allés encore plus loin puis qui disaient :
Avant la cinquième année du primaire, là, on ne devrait même pas, nécessairement, l'utiliser, puis garder plus la
manipulation, l'enseignement traditionnel. Donc, vous, vous en pensez
quoi?
M. Giroux (Patrick) : Je suis
100 % d'accord pour dire que, l'enseignant, c'est une décision
professionnelle qu'il doit prendre. À tout moment, il doit aligner, choisir les
outils avec ses intentions... les aligner avec ses intentions pédagogiques,
avec le groupe qu'il y a devant lui, avec le contenu.
Puis, des fois, la plus-value, là, c'est... pas
besoin... ça peut être très, très gros, comme ça peut être tout petit, tout
petit. Puis, des fois, là, tu sais, ça peut être gagner du temps, ça peut... On
sait, la recherche montre que les jeunes, ils vont souvent plus loin à partir
du moment... puis ils en font souvent plus, question de motivation, mais aussi
question d'accès à l'information, etc. La plus-value, elle peut prendre plein,
plein de formes. Je ne parle pas de contraindre les enseignants puis de les
obliger à le faire. Je parle de faire en sorte que par... je ne sais pas, moi,
à la fin du deuxième cycle au primaire, à la fin du premier cycle au
secondaire, puis à la fin du deuxième cycle au secondaire, on a des moments,
des jalons où on pourrait s'assurer que, sur les trois dernières années, le
jeune, il a progressé au moins de trois pas. Puis, oui, il faut que ça apporte
une plus-value, mais, en même temps, en soi, là, quand on y réfléchit, en 2025,
levez la main, ceux qui n'ont pas utilisé le numérique aujourd'hui puis ceux
qui seraient capables de se passer de leurs compétences numériques. Puis levez
la main ceux ici, que, en tant que parents, ils pensent être capables d'amener
leurs enfants à acquérir toutes les compétences que ça prend en 2025 pour faire
un usage sain puis productif du numérique. Il n'y a aucune main levée. Je ne la
lèverais même pas moi-même. C'est difficile.
Ça prend du temps. Il faut que ça soit structuré, organisé. Puis, nos
enseignants, c'est des professionnels là-dedans.
Mme Tremblay : Développer la
compétence numérique des parents pour qu'ils soient mieux outillés, c'est quoi,
les solutions? Pas qu'ils ne sont pas toujours faciles à aller chercher. Tu
sais, ils ont... Eux autres aussi, ils sont occupés. Bon, là on voit que,
depuis la pandémie, il y a eu une amélioration, évidemment, mais on fait
comment? Avez-vous réfléchi à ça? Je trouve que la nécessité, elle est là, je
suis tout à fait d'accord, mais on fait comment?
Mme Pouliot (Eve) : Bien, moi, je
pense que la première étape qu'il faut faire, c'est aller voir les parents puis
leur demander c'est quoi, leurs besoins. Puis il faut co-créer avec ces
parents-là. Donc, il ne faut pas présumer que les besoins, c'est ça, ou ça, ou
ça. Il faut travailler avec eux.
Puis, bon, comme équipe, on a déposé un projet
qui, malheureusement, là, faute de financement suffisant, n'a pas été financé,
mais c'était dans cette optique-là qu'on souhaitait faire un projet pour
vraiment, avec des parents, mieux comprendre les besoins en présence puis
co-construire des outils avec eux. Donc, je pense que les solutions, elles
doivent venir des parents eux-mêmes, là.
Mme Dion (Jacinthe) : Je pense que,
si on commence dès maintenant à mieux former nos enfants qui sont les parents
de demain... tu sais, il y a ça aussi. Ça fait que peut-être que, là, on est
dans un gap où, là, c'est peut-être difficile parce que la technologie est
arrivée puis on était déjà parents, mais, tu sais, ça prend du temps. Ça fait
que je pense qu'il ne faut pas miser ça : en dedans d'un an, on va former
tous les parents au Québec. Donc, c'est vraiment quelque chose de longue
haleine. Mais, en même temps qu'on va promouvoir puis qu'on va former ces
parents-là, il faut aussi penser à l'à-côté. Parce que je pense, entre autres,
à des travaux qu'on fait en communautés autochtones puis quand on parlait aux
parents, parce qu'on est allés voir leurs parents, puis ils nous
disaient : Moi, j'aime mieux que mon enfant soit
dans le sous-sol, en train de jouer sur PlayStation, qu'il soit dans la rue en
train de prendre la drogue parce qu'il n'y a pas d'autre chose à faire dans ma
communauté. Ça fait qu'il faut comme balancer quelles activités on met, quel
parascolaire, quel truc gratuit, peut-être, quelles installations de jeux, de
skatepark, des trucs comme ça, pour qu'il y a une balance entre les écrans à la
maison puis l'extérieur, où ça peut être intéressant pour les jeunes d'y aller.
Donc, il y a tout ça auquel il faut penser. Mais c'est sûr que, les parents,
c'est les premiers répondants puis c'est eux qu'il faut aller consulter pour
savoir comment on peut aller vous chercher, à venir chercher des outils pour
développer vos compétences.
Mme Tremblay : Une dernière petite
question... Ah! vous avez un complément? Allez-y.
M. Giroux (Patrick) : Bien, j'ai
une... Il existe des stratégies d'intervention qui sont pensées pour être
spécifiquement proches du milieu. Je pense, par exemple, aux «living labs», qui
sont des stratégies qui permettent d'impliquer le milieu puis de l'aider à
développer ses propres solutions à ses problèmes, de l'accompagner. Donc, il y
aurait moyen, par exemple, de développer des programmes où on encourage les
maisons de jeunes, les patros, je vais plaisir à Yannick, on encourage les
comités de parents à déployer des programmes comme ça qui vont permettre aux
gens qui sont autour d'eux, qui sont des gens du milieu, de s'impliquer.
Il existe aussi... On pourrait aussi favoriser
beaucoup, beaucoup ça, la formation des parents, en favorisant certains types
de recherche, puis là je ne serai peut-être pas populaire auprès de certaines
personnes au ministère de l'Éducation, mais la recherche action, la recherche
participative. Une des premières retombées de ce type de recherche là, quand...
L'école où j'ai... avec qui j'ai travaillé pendant cinq ans, dont je vous ai
rapporté les résultats, bien, pendant cinq
ans, on a discuté, réfléchi avec les enseignants. Quand on a décidé de faire
l'enquête sur le temps-écran, là, ce
n'était pas une décision des chercheurs, c'était une décision qui venait du
comité de parents puis des enseignants, ils voulaient ces
informations-là pour prendre des décisions.
Quand on fait ça, puis qu'on leur présente les
résultats, puis là, après ça, on s'assit, puis que ces gens-là, ils
disent : O.K., mais comment on fait?, puis là ils se mettent à trouver
puis à chercher des solutions, bien, on les aide aussi à développer des outils
puis à apprendre, mais surtout on les aide à prendre le contrôle sur leurs
problèmes. Je pense que, ça, c'est des pistes de solution qu'il faudrait
regarder. Toutes les solutions, que ce soit en recherche ou en intervention qui
vont permettre aux gens de prendre en contrôle leurs problèmes, ça va aider.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Giroux, Mme Dion, Mme Pouliot. Bon, j'ai
dénoté, donc, certainement, donc, que vous nous disiez qu'il fallait, donc,
vraiment, donc, mettre l'accent sur ce qui se faisait à l'extérieur de l'école.
Peut-être pour bien saisir votre propos ici... ce qui fait... ce que vous avez
entendu, donc on a beaucoup parlé de la question, donc, du... de l'usage, donc,
du cellulaire ou, donc, des écrans, donc, à des fins ludiques à l'école, donc à
l'extérieur, donc de l'usage du numérique à des fins pédagogiques, là, mais
simplement, donc, des élèves, donc, dans les périodes de pause, et tout. Est-ce
que vous, vous avez une opinion sur l'encadrement de l'usage du cellulaire à l'école?
M. Giroux (Patrick) : Écoutez, avant
même le décret du ministère, les écoles avaient le pouvoir de mettre en place des règlements. S'ils n'étaient pas
rendus à gérer ce problème-là — peut-être
que je ne serai pas populaire — mais
c'est parce que c'était un problème mineur comparé à plein d'autres problèmes
qu'ils ont dans les écoles, plein d'autres difficultés avec lesquelles ils
doivent dealer à chaque jour.
C'est un problème de gestion de classe, en
vérité, la gestion du cellulaire. Prenez votre cellulaire, mettez-le dans votre sac. Avertir le jeune, une fois, deux
fois, puis mettre en place ton programme pour la discipline, puis, tu
sais, mettre en place tes limites, je pense
que les enseignants pourraient faire ça si seulement ils avaient le temps, les
énergies, puis si seulement c'était en haut... Ils vont le faire au moment où
ça va être en haut de leur liste de problèmes.
Il faut être honnête, là. Il y a bien
d'autres... Tu sais, quand il n'y a pas de chauffage dans ta salle de classe,
le cellulaire dans les mains de tes étudiants, là, ça passe peut-être en
deuxième, troisième ou 25e priorité, là. Pour moi, ce n'est pas un si gros
problème que ça.
Moi, ce que j'ai vu dans les salles de classe,
là, c'est que les enseignants sont très critiques. Quand les enseignants
disent : Là, c'est le temps, là, on va faire ça, là, ils sont très bons à
modéliser puis à encadrer des usages productifs et sains du cellulaire, ou des
tablettes, ou des ordinateurs portables.
Maintenant, est-ce que nos enseignants ont le
temps de gérer ce qui se passe entre les cours, gérer ce qui se passe sur
l'heure du dîner? Sûrement pas. Puis je ne pense pas que ce soit très, très
important.
• (10 h 50) •
Mme
Cadet : Dans la même veine, vous nous avez sûrement
entendu beaucoup parler de majorité numérique. Là, vous êtes beaucoup dans la sensibilisation et dans le fait d'offrir
des outils et des formations aux parents pour mieux encadrer l'usage
de... des écrans, là, à la maison. Est-ce que ça signifie que vous, vous
dites : Bien, ça... en fait, que vous êtes en défaveur de l'imposition
d'une majorité numérique, plutôt d'y aller vers la voie de la sensibilisation?
M. Giroux (Patrick) : Je pense que
mes collègues vont avoir quelque chose à dire par rapport à l'âge des jeunes et
des technologies. Je suis en défaveur de tout ce qui va être contraignant. Je
pense qu'il faut éduquer nos enfants. Il faut les encadrer. Il ne faut pas
jeter la serviette, il faut leur montrer comment faire. Ça va être dur parce que les parents ne savent pas toujours comment faire. Moi le
premier, là. Je suis rentré ici puis j'ai oublié de mettre mon téléphone à off,
là. Il a sonné... il a sonné, tantôt. Ça fait que, tu sais, on a des réflexes à
développer, on a des stratégies. Si c'est contraignant, je pense que... Il
suffit que ce soit interdit pour que ce soit le fun, là. Ça fait qu'on ne
s'aidera pas, là, tu sais.
Je serais en faveur de... Je serais en faveur,
peut-être, qu'il y ait des limites. Mais interdire complètement le numérique ou
dire qu'avant un certain âge ce n'est pas possible... De toute façon, comment
vous allez faire pour mettre ça en force? Mais il y a des choses en lien
avec... il y a des choses qu'il faut savoir, par exemple, en lien avec l'âge
puis les réseaux sociaux, par exemple, le développement et...
Mme Pouliot (Eve) : Mais
complètement, complètement d'accord. Moi, je pense que ça passe par la
sensibilisation. Puis, tu sais, les efforts, les ressources devraient être
mises à contribution pour mieux sensibiliser les parents, les familles, la
société de façon générale au fait que, bon, c'est ne peut-être pas un bon usage
que de laisser un enfant devant un écran sans qu'il n'y ait de limite au niveau
des contenus, et tout ça, plutôt que d'aller vers une majorité numérique.
Mme
Cadet : Puis juste pour bien saisir vos recommandations en
termes de sensibilisation aux parents, est-ce que c'est beaucoup plus
sur qu'est-ce qui se passe, donc, sur les écrans? Donc, comment ça fonctionne?
Donc, quelque chose, donc, de plutôt didactique, ou plutôt, donc, sur les
méfaits des écrans, sur les impacts sur le sommeil, la santé mentale, la santé
oculaire, le développement langagier? Est-ce que c'est...
Mme Pouliot (Eve) : Je pense que ça
prend tout ça. Ça prend tout ça. Il faut comprendre...
M. Giroux (Patrick) : ...
Mme Pouliot (Eve) : Oui, il faut
comprendre comment ça fonctionne. Il faut comprendre aussi qu'il y a des effets
positifs, là, tu sais, il ne faut pas le nier. Ça, il y a des effets positifs
aussi, des écrans. Il y a des usages qui sont sains puis qui sont positifs
également, là, pour les jeunes. Mais, tout ça, je pense qu'il faut
sensibiliser.
Mme Dion (Jacinthe) : C'est des lois
à faire. Moi, je pense plus que c'est en lien avec les compagnies qui
développent les jeux, qui ramassent nos données, qui font des algorithmes qui
font que, quand nos jeunes sont devant une PlayStation, ils ont juste envie de
continuer parce que ce qu'ils voient les amène à continuer, ou quand ils sont
sur un téléphone, puis là il y a un autre... ils jouent à un jeu, il y une
publicité qui arrive, ils ont juste envie de cliquer là-dessus, tu sais, pour
une «OP» qui met des contenus d'ados. En tout cas, moi c'est plus ça qui
m'inquiète, beaucoup plus en termes de lois
que d'aller avec la majorité par rapport à l'âge. Désolée, mais je me suis
comme emballée.
Des voix : ...
Mme Dion (Jacinthe) : C'est ça.
Mme Cadet : C'est un sujet qui est
passionnant. Ce que vous disiez plus tôt, dans votre présentation, bien, qu'il
faut aider les parents, dans vos recommandations, aider les parents à
développer, donc, ces compétences-là à travers l'école, les centres
communautaires, les bibliothèques, à l'école, donc, dans votre mémoire, donc,
vous l'avez abordé. Donc, vous avez parlé, donc, de l'expertise des enseignants
au bout, donc, d'une formation de quatre ans. Mais justement : Est-ce
que... à travers, donc, les écoles, donc, qui disposent déjà, donc, des outils
nécessaires pour pouvoir aider, donc, ces parents... aider, donc, les parents à
développer, donc, ces compétences-là et à comprendre la portion méfait aussi
surtout? Oui, M. Giroux.
M. Giroux (Patrick) : Je veux... Je
ne veux pas parler pour les écoles, il va falloir leur demander, mais j'ai
l'impression que la cour est pleine. S'occuper des jeunes toute la journée,
planifier, corriger, etc., là, c'est déjà pas mal d'ouvrage pour nos
enseignants. Bien sûr, les bâtisses, les... probablement qu'il y a moyen de les
utiliser, de les exploiter parce qu'il y a déjà des laboratoires informatiques,
il y a des laboratoires créatifs où il y a des ordinateurs, où il y a des
robots, etc. Il y a des ressources, une partie. Mais le personnel enseignant,
je ne pense pas. Pelleter ça dans leur cour, là... Tu sais, déjà, ils
s'occupent des jeunes. S'il faut qu'ils s'occupent des parents en plus...
Mme Dion (Jacinthe) : Mais je pense
que ça pourrait passer par le communautaire. Moi, je pense à l'école secondaire
de mes enfants, l'organisme communautaire vient à l'école, puis, tu sais, deux
fois par année, ils font une soirée pour les parents, tu sais, pour parler du
numérique. Donc, je pense que de financer les organismes communautaires qui
sont près des familles, qui connaissent les besoins des parents, je pense que
ça peut être une bonne façon, là, d'aller chercher des parents par le biais des
organismes, parce qu'effectivement les enseignants, ils en ont plein leurs
bras, actuellement, avec toutes sortes de problèmes.
Mme Cadet : Peut-être une dernière
question rapidement. Merci, Mme la Présidente. Justement, est-ce que vous, vous
voyez, donc, d'autres juridictions desquelles nous, nous pourrions nous
inspirer comme législateurs, où il y a eu des campagnes de sensibilisation à
cet effet qui, pour vous, sont une réussite ou en voie d'être une réussite?
M. Giroux
(Patrick) : On peut-tu prendre les exemples ici, au Québec?
Mme Cadet : Oui, allez-y.
M. Giroux (Patrick) : Quand j'étais
jeune, ParticipAction, pendant des années, on a eu des publicités, il y a eu
des programmes. Ils sont venus dans les écoles pour faire bouger les jeunes.
Regardez ce que Pierre Lavoie a fait. Il a réussi à impliquer les familles.
Regardez, encore une fois, quand j'étais à l'école, les bacs bleus, la
récupération, les publicités, la sensibilisation. On a déjà réussi, dans le
passé, à déployer des mesures globales où on utilisait des interventions
ciblées dans les écoles, auprès des familles, mais aussi des concours, des
publicités, etc. On est capables de le faire. On n'est même pas obligés de
regarder ailleurs, là. On est capables de le faire. On l'a déjà fait. Pourquoi
on... Il faut juste s'assire puis vouloir le faire, je pense.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Mme la députée de Châteauguay.
Mme Gendron : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Merci d'être avec nous aujourd'hui. En fait, je pense qu'au niveau
des parents vous faites écho à plusieurs groupes qu'on a rencontrés. On
s'entend que vous avez proposé plusieurs suggestions afin de toucher les
parents, de toucher le milieu familial. Et je comprends bien que vos actions
devraient être plus au niveau de la famille et des parents que plutôt dans les
milieux scolaires.
Par contre, docteur, vous avez mentionné qu'il
faudrait évaluer les compétences numériques de nos jeunes. J'aimerais savoir si
vous avez des suggestions ou comment ça pourrait se traduire, ça, compte tenu
la réalité que ce n'est pas pour tout le monde aujourd'hui, ce n'est pas tous
nos jeunes qui ont accès, justement, à la technologie à la maison. Avez-vous
des pistes d'idée de comment, ça, ça pourrait se traduire sur le terrain, une
telle évaluation des compétences technologiques chez les enfants?
M. Giroux (Patrick) : Il faut savoir
que, dans la mission de l'école, dans la première partie des programmes de
formation, là c'est très, très clair que l'école, ça doit servir, entre autres,
à égaliser les chances. Quand je pense à l'évaluation des compétences
numériques, je ne parle pas... je pense à l'évaluation de compétences
numériques qui auraient pu être développées en milieu scolaire. Je parle de
celles qui sont... qui permettent d'être productif, celles qui vont... les compétences qui vont leur
permettre d'aller un petit peu plus loin en math, un petit peu plus loin en
français, un petit peu plus loin en sciences ou en univers social.
Donc, comment, moi, je vois ça? On évaluerait
les compétences qui ont été développées en classe. On structurerait un
programme pour qu'il y ait un niveau minimal de compétences puis on répartirait
le programme sur 11 ans, par exemple. On peut même... Écoutez, quant à
moi, vous pouvez inclure le collégial puis inclure l'université, là. On va
mettre la main à la pâte aussi. On le fait déjà, de toute façon, pour que nos
étudiants, quand ils sortent, quand ils finissent l'école, peu importe le
chemin qu'ils ont pris, ils aient... on sache qu'ils ont un minimum. Puis, ces
compétences-là, on est capables de les développer à l'école. C'est un petit
surplus de tâches, c'est un petit surplus de planification, mais il y a déjà
plein de ressources, comme je l'ai décrit dans le mémoire. On a un réseau de
conseillers pédagogiques, on a des documents légaux, puis il y a d'autres
choses qui s'en viennent. Il y a du travail qui se fait pour ajouter, par
exemple, l'IA à la compétence numérique.
Je pense que juste en travaillant ce qu'on peut
ou la petite partie qu'on peut voir à l'école... pour s'assurer que tout le
monde, au moins, à la fin de secondaire, a les compétences minimales numériques
pour être productif, pour être un citoyen responsable, pouvoir participer au
débat qu'on a actuellement. Il y a plein de gens qui ne comprennent pas le
débat, ils ne comprennent pas l'impact, ils n'ont pas été renseignés. Donc,
dans ma tête, ce serait juste ça, là. L'école jouerait le rôle de niveleur,
d'égalisateur des chances.
Mme Gendron : La technologie
numérique, étant ce qu'elle est, évolue à la vitesse de la lumière, là, on
s'entend. Comment faire pour que tous les acteurs, que ce soit les enseignants,
que ce soit les parents, puissent suivre ça? Parce qu'on s'entend que même
nous, là — vous
avez posé des questions tantôt — on n'est pas nécessairement à jour de tout
ce qui se fait. Donc, de quelle façon on peut toucher, justement, tous ces
acteurs-là qui doivent justement enseigner ou montrer à nos jeunes, et même à
nous, comment on fait ça?
M. Giroux (Patrick) : La première
chose, il faudrait peut-être accepter que c'est vraiment important, que c'est
rendu aussi important que d'apprendre à lire puis écrire en 2025. Tant qu'on
va... Tant qu'on n'y croira pas, ça ne sera
pas important. À partir du moment où on va y croire, bien, ça va être de la
formation continue. On va développer peut-être une certaine... Tu sais,
si on dit aux parents que c'est important, puis si les parents, ils en viennent
qu'à le croire puis à le réaliser par les observations qu'ils font, bien, ils
vont peut-être être un petit peu plus curieux puis poser des questions. Puis là
ils vont peut-être répondre à l'école quand ils organisent une soirée sur le
numérique.
Je pense que ce n'est pas une intervention qui
va régler ce problème-là, là, mais, un, la première chose que je vois, là,
c'est que tant qu'on ne sera pas convaincus que c'est important pour vrai, tant
que... «walk the talk», tant que nos actions n'iront pas dans ce sens-là, ça ne
se réglera pas. Mais, après ça, je suis désolé, mais il n'y a pas de solution
miracle, ça va très, très vite, puis il va falloir courir en arrière puis
essayer de suivre. Il va falloir se former, puis être curieux, puis...
Mme Gendron : Très
intéressant. Merci. Je n'ai pas d'autre question.
La Présidente (Mme Dionne) : M. le
député d'Hochelaga-Maisonneuve.
• (11 heures) •
M. Leduc : Merci, Mme la Présidente.
J'ai beaucoup aimé votre montée de passion il y a quelques instants. Ça m'a
allumé, moi aussi. C'est pour ça que j'ai levé la main. Parce que moi, je
pousse beaucoup cette réflexion-là, puis pas juste sur le jeu vidéo. Tu sais,
on est en train de réfléchir sur, potentiellement, des interventions à faire.
Et la Belgique a interdit les fameux «loot boxes», là, les jeux de hasard qui
sont normalement interdits aux enfants, mais qui sont permis sur les jeux
vidéo. Mais j'aimerais ça aussi vous entretenir sur la question des réseaux
sociaux. Quand ça a commencé, Facebook, il y avait une fin à Facebook, hein? On
déroulait, on déroulait, puis, à un moment donné, c'était tout ce que vos amis avaient
publié aujourd'hui. Il y avait une fin. Après 45 minutes, une heure, là,
vous aviez fait le tour de Facebook aujourd'hui.
Aujourd'hui, on a inventé, donc, des
fonctionnalités pour vous garder accrochés le plus longtemps possible pour vous
vendre la publicité, essentiellement. Ça fait que c'est le déroulement infini,
le démarrage automatique de vidéo, les boutons «J'aime», etc. Est-ce que ça ne
serait pas envisageable de venir faire... j'utilise le terme un peu classique, mais
la police de ce genre de situation là? Est-ce qu'on pourrait commencer à
dire : Bien, c'est fini, ça, le déroulement automatique, c'est fini, le
démarrage automatique de vidéos, les boutons «J'aime»?
Chaque fois que j'en parle à du monde, puis là
on s'adresse aussi aux adultes... vous parlez des parents, puis, moi, je plaide
coupable aussi, des fois, le téléphone m'attire, puis il faut que je me force à
le laisser pour me concentrer sur ma fille puis les activités que je fais avec
elle. Mais est-ce que toutes ces choses-là, qu'on pourrait venir limiter — parce
qu'on s'imagine qu'il y en a peut-être d'autres qui vont être inventés dans le
futur, encore pire — ne
viendraient pas aussi ressouder cette relation-là, parent-enfant, et aider les
parents aussi, comme adultes, de manière générale?
Mme Dion (Jacinthe) : C'est une
bonne question. J'aurais comme tendance à dire oui, mais, en même temps, je
trouve ça important de développer l'esprit critique. Mais, en même temps, je
sais que, tu sais, la façon que le cerveau... comment il est fait, tout ça,
puis les algorithmes, puis... tu sais, ces gens-là, ils étudient ce que les
cerveaux aiment, tu sais. Ça fait qu'ils vont développer cette technologie-là
justement pour qu'on reste plus accros. Parce que ces compagnies-là, on le sait,
plus qu'on reste accros longtemps, plus on voit de publicités. Puis plus on
voit de publicités, plus qu'ils font de l'argent. Plus qu'ils font de l'argent,
plus que... Tu sais, c'est une roue sans fin, là. C'est comme Google qui vous a
déposé un mémoire, là, qui disait qu'ils prennent des mesures. Je m'excuse,
mais, non, ils ne prennent pas des mesures, là, tu sais. Mais, je veux dire,
ils en prennent, mais c'est mineur comparé à tout le reste. Ça fait que...
M. Giroux (Patrick) : Ils prennent
autant de mesures... Ces compagnies-là prennent autant de mesures pour empêcher
certains contenus qu'ils prennent de mesures pour vous garder captifs devant
l'écran. Si on veut régir, peut-être qu'on peut aller dans ce sens-là. Oui,
c'est clair que ça a un impact, là. Les interfaces aujourd'hui sont faites pour
vous garder devant l'écran. Plus vous êtes là longtemps, plus vous... plus ils
en apprennent sur vous, plus ils peuvent utiliser ça pour cibler, cibler la
publicité, pour cibler la prochaine vidéo qu'ils vous envoient pour vous garder
encore plus longtemps captif.
Une des choses, une des compétences que les
gens... puis une des connaissances que les gens doivent acquérir, c'est :
C'est quoi, un algorithme? Comment ça fonctionne? Ces sites-là sont programmés
pour vous garder. Ils ne sont pas programmés pour vous envoyer les infos sur
vos amis, là, ils sont programmés pour vous garder devant l'écran. C'est une de
leurs premières fonctions. Donc, je pense que c'est une voie de... Je ne suis
pas spécialiste des logiciels, etc., mais, clairement, c'est sûrement une voie
à explorer. Ça sort beaucoup de l'éducation.
Mme Dion (Jacinthe) : Mais même les
contrôles parentaux qu'ils mettent sur les téléphones, là, moi, je le sais,
j'ai des enfants puis... je suis avec Apple puis je me disais : Pourquoi
ça dépasse? Mettons, je mets deux heures, je ne sais pas, puis là c'est plus
que deux heures, je me demande pourquoi. Finalement, j'ai réalisé, tu sais,
dans le fond, mon fils, quand le deux heures est terminé, c'est écrit «encore
une minute», ça fait que, là, il clique «encore une minute», il clique «encore
une minute». Puis moi, je me suis informée, là, est-ce qu'on peut enlever ça.
Bien non, c'est comme ça dans le téléphone. Ça fait que, là, je me dis :
O.K., tu sais, l'application Apple met ça en place pour aider les parents,
mais, au final, tu sais... Puis là, bien, encore une minute, ça fait que, là,
il y a encore comme une dépendance de... tu sais. En tout cas, mais c'est ça,
c'était juste pour vous donner un exemple de... dernièrement, je me suis rendu
compte de ça, mais, en tout cas, j'ai hâte de t'en reparler, Patrick,
justement, mais c'est ça. Ça fait que je ne sais pas, comment on peut faire, tu
sais, moi, je ne suis pas en politique, là, mais c'est sûr que moi, il y a
quelque chose qui me dérange, de ces grandes compagnies-là, tu sais, qui font
de l'argent puis qui ramassent des données sur le dos de nos enfants, tu sais,
il y a quelque chose de préoccupant par rapport à ça.
Mme Pouliot (Eve) : Puis il y a de
l'éducation à faire chez les parents puis chez les jeunes eux-mêmes parce
qu'ils ne savent pas. Puis, à partir du moment où tu es sensibilisé à ça, tu
fais plus attention aussi, là. Donc, au-delà du contrôle, je pense qu'il y a
des mesures de sensibilisation aussi, là.
M. Leduc : Dans les...
La
Présidente (Mme Dionne) : Malheureusement, le...
M. Leduc : C'est
déjà fini?
La Présidente (Mme
Dionne) : Oui, bien, 30 secondes, allez-y.
M. Leduc : 30 secondes. Dans les... Juste vous dire,
dans les classes qu'on visitait, on demandait aux jeunes : Est-ce
que vous trouvez que vos parents donnent un bon exemple? Puis il n'y avait pas
beaucoup de mains levées.
Mme Pouliot
(Eve) : Je ne suis pas étonnée.
M. Giroux
(Patrick) : Je ne suis pas surpris non plus.
Mme Dion
(Jacinthe) : On fait une étude, actuellement, là-dessus, puis les
jeunes, ils répondent que leurs parents sont trop sur leurs téléphones, là,
c'est...
M. Leduc :
Exact.
La Présidente (Mme Dionne) : On
a eu les mêmes réponses dans notre tournée. Alors, Dr Giroux,
Dre Pouliot, Dre Dion, merci beaucoup pour votre contribution à ces
travaux.
Donc, pour l'instant,
je suspends les travaux pour accueillir nos prochains témoins. Merci.
(Suspension de la séance à
11 h 05)
(Reprise à 11 h 11)
La Présidente (Mme
Dionne) : La commission reprend maintenant ses travaux.
Donc, nous avons le
plaisir d'accueillir les représentants d'HabiloMédias. Alors, bonjour et
bienvenue. D'abord, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
nous faire part de votre exposé. Peut-être, vous présenter aussi, d'emblée. Et, par la suite, on va procéder à une
période d'échange avec les membres de la commission. Donc, la parole est
à vous.
HabiloMédias
Mme Hill (Kathryn
Ann) : Merci. Bonjour, je m'appelle Kathryn Hill et je suis la
directrice générale d'HabiloMédias. Nous sommes le centre canadien à but non
lucratif pour la littératie aux médias numériques. Je ferai notre discours
d'ouverture et mon collègue Marc Alexandre répondra aux questions.
HabiloMédias effectue
de la recherche et développe des ressources éducatives pour les jeunes au sujet
des médias et les technologies depuis près de 30 ans. Notre travail inclut
du soutien aux enseignants, aux parents et aux jeunes dans le développement de
la littératie aux médias numériques.
Nous nous sommes
profondément immergés dans le sujet de l'impact des écrans et des médias
sociaux sur les jeunes. Et il est clair que nous nous trouvons à un point
tournant crucial dans la façon dont nous abordons le sujet des jeunes et de la
technologie. La technologie, en particulier les médias sociaux, présente à la
fois des défis et des opportunités. Alors que certaines juridictions tentent
d'interdire les appareils et les médias sociaux, notre position est que le
moyen le plus efficace de naviguer ce paysage complexe est de responsabiliser
les jeunes grâce à la littératie aux médias numériques. Plutôt de recourir à
des interdictions générales ou à des restrictions d'âge, nous préconisons une
approche qui met l'accent sur des habitudes médiatiques conscientes et
positives, dotant les jeunes des compétences dont ils ont besoin pour
s'épanouir à l'ère numérique. À l'exception des plus jeunes enfants, notre
objectif n'est pas de réduire le plus possible le temps passé devant un écran,
mais de leur apprendre à contrôler leur utilisation des médias et de les aider
à développer des habitudes médiatiques conscientes et positives. Il est
important de reconnaître que le temps passé devant un écran n'est pas en soi
nocif. L'accent doit être mis sur ce que nous faisons et voyons lorsque nous
utilisons des écrans. Il s'agit d'aller au-delà de la simple mesure de temps
passé et d'examiner plutôt les activités spécifiques et le contenu consommé.
Les médias sociaux peuvent offrir des avantages importants comme le lien
social, l'éducation et l'expression de soi. Aussi, les recherches suggèrent que
les jeunes les plus vulnérables aux risques en ligne peuvent également tirer le
plus grand bénéfice de ces technologies. Certaines activités, comme la
publication de contenus et l'envoi de messages à des amis sont liés à un meilleur
bien-être et d'autres activités sont associées à des niveaux plus élevés de
solitude.
Alors,
la clé, ici, est une approche nuancée qui se concentre sur des comportements et
des contextes spécifiques, car les façons dont nous utilisons les médias
sociaux et les appareils sont complexes. Une interdiction générale ou une réduction d'âge ne peut pas tenir
compte de cette complexité. Lorsque l'on considère les inconvénients
potentiels de la technologie, il est tentant de se précipiter vers des mesures
restrictives. Cependant, nous devons être conscients des risques de
contre-performance des interdictions. Les stratégies trop générales peuvent se
retourner contre les jeunes, car elles peuvent les pousser à prendre plus de
risques parce qu'ils ignorent les raisons spécifiques pour lesquelles une
activité peut être nuisible.
Les
recherches montrent également que le retrait de la technologie en guise de
punition peut nuire à la confiance et rendre les jeunes moins susceptibles de
demander de l'aide lorsqu'ils en ont besoin. Il s'ensuit donc que
l'interdiction d'appareils ou de médias sociaux pourrait envoyer le message que
les jeunes doivent garder secrètes leurs activités technologiques. Si les
jeunes entendent constamment qu'ils sont malades et accros à leurs applications
de médias sociaux, cela peut devenir une cause créée qui engendre son effet
pour certaines jeunes, qui commencent à y croire et à se comporter en guise de
cette croyance. Malgré les nombreux défis associés au respect des interdictions
d'âge sur les médias sociaux, y compris les éventuelles préoccupations en
matière de confidentialité, nous devons également garder à l'esprit qu'il
n'existe pas d'âge magique auquel les jeunes deviennent immunisés contre
d'éventuels préjudices médiatiques. Fixer une limite d'âge risquerait de
laisser les jeunes se déchaîner sur une plateforme sans l'encadrement et les
conseils nécessaires des adultes.
Nous
devons apprendre aux jeunes à utiliser la technologie de manière responsable
avant qu'ils ne s'immergent complètement.
Au lieu de nous concentrer sur des restrictions générales, nous devons
reconnaître le pouvoir de l'éducation aux médias numériques. Notre
objectif devrait être d'apprendre aux jeunes à contrôler leur utilisation des
médias et à développer des habitudes médiatiques conscientes et positives.
Lorsque les jeunes comprennent ces techniques, ils peuvent mieux contrôler leur
expérience en ligne.
Nous devons
promouvoir une conception plus saine et apprendre aux jeunes à remettre en
question les normes sociales qui les poussent à être constamment disponibles.
Il est essentiel de s'attaquer aux pièges de la comparaison que peuvent créer les médias sociaux en enseignant aux
élèves comment organiser leurs flux. Plus important encore, l'éducation
aux médias numériques devrait être une partie obligatoire de l'apprentissage
tout au long de la maternelle et jusqu'à la fin du secondaire et même au cégep
afin de garantir que tous les élèves disposent des outils dont ils ont besoin
pour utiliser la technologie de manière consciente et positive. C'est pourquoi
notre travail est fondé sur un cadre théorique qui aborde tous les aspects de
l'éducation aux médias numériques et permet aux jeunes de s'habiliter en tant
que citoyen numérique. Notre approche ne consiste pas à ignorer les dangers
potentiels de la technologie, mais à préparer les jeunes à naviguer dans leur
monde numérique de manière responsable, critique et conscient. En donnant la
priorité à l'éducation aux médias numériques, nous pouvons aider les jeunes à exploiter
les avantages de la technologie, tout en atténuant ses risques, en les
préparant à être des participants actifs et conscients du monde numérique
plutôt que des consommateurs passifs. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup pour ces interventions. Donc, nous allons débuter la période
d'échange avec Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
• (11 h 20) •
Mme Cadet : Merci,
Mme Présidente. Bonjour, Mme Hill. Bonjour, M. Johnson. Et
bonjour, M. Ladouceur. Merci pour la présentation. Donc, bien saisis
l'essence de votre propos, donc, sur l'éducation et la sensibilisation qui doit
être faite, non seulement du côté des parents, mais également du côté des
jeunes. Vous avez peut-être entendu nos intervenants précédents qui nous
disaient que, par exemple, donc, en ce qui a trait, donc, à l'école... Parce
que j'ai cru comprendre que vous parliez donc d'un cursus, donc, d'éducation
aux médias numériques à l'école, que, bon, le cursus est déjà très, très
complet, et que les enseignants sont déjà très débordés et que ça peut être une
ressource, donc, plutôt difficile. Et, au même titre, donc, oui, les parents,
manifestement, doivent disposer de plus de ressources,
doivent disposer d'une meilleure, donc, sensibilisation à... autant, donc, à ce
qui peut être fait sur les différents outils numériques, à des fins
pédagogiques, ou autres, ou récréatives mais également aux différents méfaits.
Je vais donc me
tourner sur peut-être un aspect que j'ai moins entendu de votre part, donc sur
les plateformes en tant que telles. Donc, justement pour donner une espèce de
souffle aux parents qui peuvent être débordés et à l'environnement scolaire... Bien, on le voit et on l'a entendu, donc il
y a plusieurs mécanismes qui retiennent les jeunes sur les plateformes,
et parfois donc bien avant qu'ils disposent des... de la maturité nécessaire
pour bien comprendre, donc, comment utiliser ces plateformes-là. Donc, vous,
comment est-ce que vous pensez que, comme législateurs, on peut encadrer les différentes plateformes du monde
numérique afin de rendre leur utilisation plus sécuritaire pour les
jeunes?
M. Ladouceur (Marc
Alexandre) : Merci. C'est en fait une excellente question. Parce qu'on
a reconnu déjà trois aspects importants, c'est-à-dire qu'à quelque part il y a
une intersection entre la présence des parents, le modèle des parents,
l'éducation et la législation avec les plateformes numériques. Donc, on... je
les inclurais même dans une intersection par quatre voies. Et puis l'importance
évidemment de la réglementation, elle est aussi reconnue. On le sait que des
jeunes réclament, par exemple, que les plateformes puissent leur donner le
droit d'être oubliés. Ils voudraient que le rapport à la désinformation soit
plus facile d'accès, c'est-à-dire qu'ils nous ont rapporté, dans nos propres
groupes de recherche, qu'ils vont en ligne, évidemment, pour s'amuser, et les
plateformes vont leur offrir cette
réalité-là, et on... Bon, on a déjà parlé, j'ai entendu dans le dernier
groupe... on a constaté que c'est un jeu quasiment sans fin, et je le reconnais, mais ce que je veux
dire ici, c'est que les informations aussi qui paraissent dans ce jeu
sans fin peuvent être justes ou non, sans
nécessairement avoir des façons faciles de le repérer. On offre donc des
suggestions sur comment rapporter de la désinformation, comment la
rendre plus facile, comment la rendre quasiment divertissante, dans le... de la
même façon que les autres parties. Ils réclament aussi pouvoir comprendre ce
qui se passe quand on leur demande d'accepter cette terminologie juridique,
etc. qui paraît dans les conditions d'utilisation. Par ces trois moyens-là,
déjà, on... on sait que c'est ce que les jeunes réclament et on veut répondre à
leurs besoins lorsqu'on cherche aussi à offrir des moyens d'agir dans ce monde
numérique là.
Mme
Cadet : Oui. Bien oui, mais je vais continuer sur cette
même lancée-là, parce que vous avez vous-même évoqué le droit à l'oubli. C'est effectivement, donc, un... Bien, en
fait, une des intervenantes hier, donc, nous amenait sur cette piste-là. Parce
qu'effectivement, donc, les informations qui sont partagées par... bien, en
fait, par l'ensemble des utilisateurs,
mais notamment, donc, par les mineurs sur les plateformes, donc ne leur
appartiennent plus à ce moment-là. Et ça fait partie des préoccupations
que les jeunes peuvent avoir au fil du temps. Donc, vous, qu'est-ce que vous
recommandez au législateur en matière de droit à l'oubli?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Là,
on se tourne énormément vers l'éducation, c'est-à-dire que le droit à l'oubli,
ça appartient quasiment à la formule de la plateforme et une interaction entre
les législateurs et la plateforme. Nous autres, notre spécialisation, ici, se
veut sur le côté de l'éducation, la littératie pour prendre l'expression
pédagogique. Donc, déjà, l'éducation aux médias numériques va montrer aux
jeunes à se servir des plateformes comme s'ils avaient accès au droit à
l'oubli, à contrôler leur flux, à contrôler leur public, à agir de façon à ce
que leurs informations ne soient partagées que selon leur modalité
intentionnelle. L'éducation aux médias numériques, aussi, se fait toute... telle que proposée tout au long du monde... du
parcours éducatif des jeunes, faisant en sorte qu'on peut modeler dès un
plus jeune âge, O.K., qui peut voir quoi. Ensuite, on peut essayer de
comprendre c'est quoi l'implication de mes données? C'est quoi... pourquoi
est-ce que je reçois certaines publicités tandis que d'autres en reçoivent des
versions complètement différentes? Qu'est-ce qu'un algorithme? Je continue avec
des considérations d'âge. Qu'est-ce qu'un algorithme? Comment est-ce que ça
affecte mes interactions maintenant? Pourquoi est-ce qu'on me recommande certaines personnes comme nouveaux amis, comme
nouvelles connexions? Par la suite, comment est-ce que je fais pour
contrôler ces informations-là? Mon image? L'image de... à laquelle je compare
sur les médias sociaux, qui fait encore partie des raisons pourquoi on s'y
abonne si rapidement. Et, bon, je pourrais en donner plusieurs exemples, là, ça
fait partie carrément de notre spécialité. Mais tout ça pour dire qu'on sait
que quand les jeunes agissent de façon consciente, c'est sûr qu'il va quand
même y avoir d'autres problèmes par... bon, par rapport à toutes les
informations qui peuvent leur parvenir, mais ils ont une base de référence sûre
sur laquelle s'appuyer, ce qui risque de... d'avoir, excusez-moi, un effet
positif sur les comportements face à ces informations-là aussi. Or, l'éducation
mène à une utilisation consciente des médias sociaux. Et, avec tous ces
droits-là, ils peuvent aussi commencer à les réclamer eux-mêmes, être habiletés
à dire : O.K., mais nous autres, on veut ce droit-là, qu'est-ce qu'il faut
pour y parvenir? Et devenir acteurs dans le monde, eux-mêmes.
Mme Cadet : Sur qui peut voir quoi,
parce que vous l'avez évoqué, nous, quand on a fait la tournée des écoles,
quand on demandait, à main levée, aux élèves : Qui, ici, s'est créé un
compte bien avant 13 ans, bien avant 14 ans? Tout le monde levez la main
et tout le monde, donc, disait : Mais moi, je n'ai pas mis... évidemment,
j'ai indiqué que j'étais né en 1995 ou en 1998 et pas en 2005 et en 2008. À ce
moment-là, tu sais, on le sait, donc c'est quand même relativement important
que, donc, les comptes, donc, des utilisateurs, donc, d'âge mineur puissent
être confidentiels, que pour des raisons
de... pour des motifs de sécurité. Est-ce que d'abord, en termes de votre
sensibilisation que vous faites, est-ce que
c'est un élément sur lequel vous mettez l'accent? Et, encore une fois, en
parallèle, au niveau des plateformes, est-ce que vous pensez que ça
pourrait être une forme d'encadrement utile pour protéger ces jeunes
utilisateurs-là, étant donné, donc, les défis en matière de vérification d'âge,
là, qui viennent avec le fait d'établir un seuil minimal pour atteindre les
différentes plateformes, pour s'inscrire sur les plateformes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : D'abord,
carrément, oui. Ce que je veux dire, ce n'est pas de façon simpliste, mais,
pour les jeunes de 13 à 17 ans, on recommande fortement toutes les
protections qu'il faut pour leurs données. Ils sont mineurs et doivent être
traités ainsi. Ça fait partie de plusieurs formations chez HabiloMédias que de
dire aux jeunes ou aux parents des jeunes qui veulent savoir un peu comment
naviguer ce portrait-là, et même les enseignantes
et les enseignants, que quand tu dis qu'à 13 ans, tu... excusez-moi, à
10 ans, tu en as 13, eh bien, à partir de l'âge de 15 ans, tu vas être traité comme un adulte d'âge majeur et
les protections soudainement s'évaporent, parce que d'après la
plateforme tu as l'âge qu'ils ont recommandé. C'est pourquoi aussi les
restrictions d'âge ont toujours... comment est-ce je pourrais dire, certaines
complexités qu'il faut adresser, parce qu'il n'y a pas moyen sûr de savoir
nécessairement c'est quoi l'âge d'une personne sans rentrer dans un terrain
éthique ou un terrain de données et de vie privée, bon, je vais dire nuancé,
mais même potentiellement problématique.
La question des plateformes aussi. On pense par
exemple à TikTok qui, par défaut, pour les mineurs, a déjà des restrictions
plus sévères que pour leurs autres utilisateurs. Donc, il existe des modèles
déjà pour pouvoir protéger les âges de 13 à 17 ans.
Encore, nous autres, comme organisme
d'éducation, on veut mettre l'emphase que oui, il faut être au courant de tout
ça. Ça fait partie de la conscience pour comprendre comment devenir des acteurs
dans le monde du numérique. Et je sais que je le répète, mais cette fois-ci
pour dire que les jeunes qui savent pourquoi on met des règlements en place,
d'après nos recherches, ont démontré plus de chances de suivre ces règles-là
que de juste mettre des règles en place sans valeur associée.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme la
députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Merci beaucoup. Tout
à l'heure, vous avez bien nommé le fait que retirer les tablettes ou le
cellulaire, là, à toutes les sauces, comme punition ou conséquence, finalement,
ça pouvait vraiment briser un lien de confiance avec les parents puis que les
jeunes déclareraient moins s'il y avait un incident en ligne, par cette perte de confiance là à un adulte responsable. Quel autre système
on pourrait mettre en place, ou vers quel adulte, tu sais, pour créer un canal
sain? Parce que, quand j'ai fait les écoles dans mon comté, les enfants ne
savaient pas quoi me répondre, franchement. Vers qui se retourner en cas...
Puis j'ai eu toutes sortes de réponses farfelues.
Puis toute la notion entre signaler un incident
versus bloquer la personne. Puis il semble y avoir une grande tendance à
bloquer, parce que, si on signale, puis que ce n'est pas pris au sérieux, il
peut y avoir des conséquences pour les jeunes. Ça fait que comment être
capables, nous, législateurs, d'encadrer ça pour qu'un signalement protège un
plus grand nombre de personnes puis que ce soit fait de manière sérieuse?
• (11 h 30) •
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : O.K.
Si vous me permettez, j'entends deux volets à la question.
Mme Bogemans : ...
M.
Ladouceur (Marc Alexandre) :
Oui? O.K. Parfait. Au premier volet, la question de comment reconnaître
les adultes de confiance — c'est
ce que je... c'est l'expression qu'on utilise — pour ça, bon, on y va par...
je sais qu'on va reprendre, mais des
activités comme le covisionnement, comme les conversations continues, comme la
participation semi-active dans la vie numérique des jeunes. Et ce que je veux
dire... «Semi-actif», bon, on va le rendre un peu plus concret comme
expression, c'est-à-dire que dès un jeune âge on s'intéresse, on pose des
questions, on participe. Comme ils deviennent plus vieux, on leur donne plus
d'indépendance, on leur fait de plus en plus confiance. On peut dire
carrément : Écoute, je veux avoir tes mots de passe pour avoir accès à tes
réseaux sociaux, mais je ne m'en servirai qu'en cas d'urgence. On veut essayer
d'enlever, excusez-moi l'expression, l'élément de l'hélicoptère — et
pardon, quand je dis «on» ici, je parle de parents — et intégrer de plus en
plus le modèle... bien... comme une piscine, hein? Finalement, je ne tiendrai
pas mon adolescent par les épaules pendant qu'elle ou il nage, je leur
permettrai de nager par leurs propres moyens, sachant que j'ai mis en place les
éléments de covisionnement, etc., qui venaient avant ça. Comme ça, s'il y a un
problème, au lieu de tout de suite enlever l'appareil et de briser ce lien de
confiance là, on peut commencer d'avoir des conversations.
Ce qui mène super bien à la prochaine question
par rapport aux signalements et aux blocages, parce que les jeunes nous ont
aussi rapporté dans nos recherches que c'est, des fois, difficile de bloquer
quelqu'un ou de le signaler. Ils ont peur de rompre ces mêmes liens sociaux là
entre eux et leurs pairs que s'ils répondaient ou répondaient de la mauvaise
façon, en tout cas, dans certaines situations. Mais il faut comprendre aussi la
façon que les outils fonctionnent. Par exemple, un blocage signifie que
personne d'autre ne peut voir que ça a été bloqué, nécessairement, qu'on fait
juste arrêter de voir le flux ou les commentaires de telle personne.
Mais je voulais... je voulais juste poser une
question de clarification ici par rapport... Parce qu'on a dit «blocage», «rapportage», et qu'est-ce qu'on
fait, comme membres législatifs, pour assurer un meilleur
fonctionnement?
Mme
Bogemans : ...dans le fond, si on met des barres d'outils
standards, ou on demande aux plateformes, quelles qu'elles soient, là,
que ce soit YouTube, les jeux vidéo de manière générale, aussitôt qu'il y a une
connectivité avec l'autre, les médias sociaux, des boutons d'aide pour les
enfants qui sont très, très clairs comme bouées de sauvetage. Mais dans tout ce
que je viens de nommer, tout le monde a une version de ce qui est bloqué, ce
qui est signalé et une façon de faire la médiation ou de prendre la décision
sur ce qui sera effectivement retiré comme contenu ou pas. Puis, dans certains
cas, dans les jeux vidéo, il y a des conséquences si tu l'as fait pour rien.
Puis ça, ça... en tout cas, c'est un fort élément dissuasif de signaler pour
les jeunes garçons, là, pour les jeux vidéo, en tout cas.
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : O.K.
Merci. Ça aide énormément, en fait, à répondre, parce que... D'ailleurs, les
outils de signalement, déjà, sont difficiles, et, pour reprendre l'expression
d'un des jeunes, «pas le fun». C'est... ça fait partie du vocabulaire qu'on a
entendu qui crée déjà un niveau de résistance par rapport à leur utilisation.
Donc, si on avait des... disons, plus standardisés comme vous avez suggéré, ou
encore des outils de signalement faciles à utiliser avec des conditions
claires... Parce que l'autre question, c'est que, quand on regarde la façon de
se servir des outils de signalement, les jeunes disent que ça change de
plateforme en plateforme, ça manque de
clarté, on ne comprend pas toujours toutes les conséquences. Donc, la
compréhension, et c'est là que je veux répondre à la question, joue le
rôle le plus important. D'avoir des outils qui sont clairs et qui se
comprennent facilement va permettre aux jeunes de, d'après eux, mieux s'en
servir.
Mme Bogemans : Super. Puis je
voulais juste bien comprendre vos propos. Tout à l'heure, vous disiez que retirer un élément ou juste l'exclure de la vie,
ce n'est pas une solution. Mais, si on va, par exemple, vers une
solution qui est : pas de portables ou d'outils technologiques personnels
à l'école, mais avec un matériel qui est fourni par l'école, contrôlée par l'école et un cours de citoyenneté
numérique, est-ce que, pour vous, ça, ce serait un compromis
raisonnable?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Ce
que j'entends, bien, c'est justement un cours comme, disons, en continu. Et ça,
c'est, oui, déjà quelque chose qu'on préconise tout le temps. Je pense que le
vocabulaire joue aussi un rôle important, c'est-à-dire que, si on va parler des
restrictions comme un retrait des outils, ça devient... bien, tu sais, c'est
une marche finale, il n'y a plus d'autre option. Si on parle de mesures qu'on a
mises en place, là, il y a au moins un élément... et je ne parle même pas de
négociations de l'utilisation de l'outil en salle de classe, mais un élément
pour montrer qu'on les enlève avec raison et avec un progrès en tête. C'est
pour ça qu'on en parlait de cette façon-là dans nos commentaires initiaux.
Mme Bogemans : Merci.
S'il reste du temps, j'aurais une dernière question après les autres.
La
Présidente (Mme Dionne) : Bien, vous pouvez poursuivre. Après,
Mme Bourassa-Sauvé avait une question aussi. Donc, je vais vous
laisser poser votre question.
Mme Bogemans : Parfait. C'est au
niveau de la littératie. Comme c'est vraiment le centre de ce que vous faites,
je voulais savoir si votre organisme serait à même, selon vous, de juger le bon
matériel pédagogique sain ou exempt de mécanismes qui pourraient garder les
enfants addictifs ou de mécanismes de jeu de loterie ou des choses comme ça pour être utilisés dans les écoles. Et
sur, encore, la littératie, mais une deuxième question, c'est : Qu'est-ce
que vous pensez d'une possibilité d'obliger
la divulgation de qui finance les études sur ce qui est numérique vis-à-vis des
jeunes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Parfait,
je vais commencer. Première question... pardon, deux questions
superintéressantes, et la première, au niveau de la littératie, je la trouve
extrêmement importante et je peux répondre que, carrément, oui, on a les
outils. D'ailleurs, tout notre matériel, tout ce qu'on publie... et il y a un
tas de leçons sur une multiplicité de sujets qui sont reliés à un cadre
théorique, et le tout relié au cursus scolaire existant pour les enseignantes et les enseignants. Et, oui, au
Québec, mais dans toutes les provinces. Donc, non seulement sommes-nous
en mesure, mais on y oeuvre depuis 20 ans, presque 30, et puis... Donc, ça
existe et c'est déjà en place.
En ce qui est des jeux de loterie, par exemple,
et tout ça, on a des matériaux sur la publicité, sur ce qui nous garde
intéressés. On a du matériel qui est spécifiquement sur le sujet des jeux en
ligne et comment y participer, comment
savoir ce qui se passe et comment pouvoir communiquer si jamais il y a un
problème. Donc, bon, ça adresse une certaine partie du sujet, mais c'est
encore plus grand, et, encore une fois, le matériel est là.
Et ça nous amène donc à notre deuxième
question : Comment est-ce qu'on fait pour publier un tel matériel? La
transparence de la recherche, je trouve que c'est superimportant. Je peux
parler pour moi en tant qu'individu autant qu'en tant qu'organisation, parce
qu'on a toujours des mesures en place, peu importe le financement, pour pouvoir
assurer que le matériel soit fiable directement envers le matériel de recherche
ici. Notre équipe de recherche travaille de façon ardue pour assurer que ce que
nous présentons est toujours fiable et reflète les mesures les plus reconnues.
«Reconnues», c'est quasiment difficile à dire parce qu'on est en plein dans le
centre des données émergentes, mais c'est le mot que je vais utiliser pour...
Donc, oui, cette transparence doit être évidente.
Mme Bogemans : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Oui. Merci, Mme la
Présidente. Donc, deux questions complémentaires, puisque le temps nous le
permet.
D'abord, dès
le départ, Mme Hill, donc, vous disiez, pour vous, pour HabiloMédias, donc, ce
que vos recherches, donc, vous ont permis de conclure, c'est qu'à votre
sens, donc, le temps d'écran était moins important que ce que les jeunes, donc,
faisaient, donc, sur les écrans. Vous n'êtes pas sans savoir qu'en fait, donc,
la grande majorité des intervenants qui sont venus en commission, donc, nous
ont parlé du temps d'écran en tant que tel comme donnée à mesurer, tant au
niveau du temps d'écran à des fins pédagogiques que du temps d'écran à des fins
récréatives. Donc, peut-être, en entendre un peu plus de votre part sur cet
élément-là dans un premier volet, et, dans un second volet, à savoir si vous
faites cette distinction-là, de votre côté, au niveau du temps récréatif versus
pédagogique.
• (11 h 40) •
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Je
sais que la question a été dirigée à Kathryn. Est-ce que ça va si je réponds?
O.K., parfait, merci. Parce que, oui, on fait cette distinction-là. On le sait
que du temps d'écran récréatif versus pédagogique, ça existe. On sait qu'il
faut considérer la qualité et le contenu autant que le temps, qu'il faut aussi
considérer... Et c'est là que je vais ajouter un petit peu la modalité autour
du temps d'écran.
Donc, le temps d'écran, dans le vide, que ce
soit un contenu pédagogique... excusez-moi, «le temps d'écran»... bon, j'utilise la mauvaise expression, la consommation des
médias, qu'ils soient pédagogiques ou récréatifs, ou un ou l'autre,
consommée dans le vide ou sans interaction avec, disons, un adulte pour un plus
jeune ou avec des cadres, des questions... un retour beaucoup moins important
qu'un temps d'écran qui est en soi social et participatif. Donc, non seulement
est-ce qu'il faut distinguer entre les différentes qualités de ce que nous
consommons, mais aussi des modalités familiales, sociales qui existent autour
de ces qualités-là.
On encourage, avec l'association canadienne de
pédiatrie, ce qui est... tout ce qui est créatif, éducationnel, ce qui est
social et même ce qui amènerait à une certaine participation active, physique
de la part des utilisatrices et des utilisateurs. Ces catégories ont été
démontrées comme étant — bon,
je voulais éviter de me répéter, mais je vais le faire quand même — plus
efficaces et rendent le temps d'écran plus... fait promotion, excusez-moi, du
temps d'écran comme quelque chose de plus actif que de passif. Et c'est là que
je veux mettre la distinction finale que la consommation passive, toujours...
Oui, pardon, je vois un doigt. Est-ce que...
Mme Cadet : Finissez, puis je
vais...
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : O.K.
Pardon. Donc, la consommation passive n'a jamais les mêmes retours qu'une consommation active. Et la
passivité, donc l'autolecture, l'écran comme façon de faire passer le
temps, tout ça tombe dans une même catégorie de peu de
retours versus les questions d'activités, l'engagement physique, éducationnel,
etc.
Mme
Cadet : Juste pour bien comprendre... Donc, j'ai bien
saisi votre réponse au deuxième volet de ma première question, mais,
pour le premier volet, alors est-ce que, oui ou non, le temps d'écran est une
variable pour vous?
M.
Ladouceur (Marc Alexandre) : Bon, pour les enfants de deux ans et moins, avec
l'association pédiatrique avec
laquelle on a consulté, c'est sûr qu'on le recommande le moins possible et on
sait que le temps d'écran peut affecter, mais les provisions que j'ai
ajoutées sont celles qui doivent être prises en ligne de compte si on pense au
temps d'écran comme une seule mesure, comme étant de même qualité, que ce soit
une émission à la télévision qu'un jeu éducationnel, etc.
Mme Cadet : ...deuxième question
ici : Est-ce... En fait, selon vous, quelle doit être la responsabilité
des plateformes, je pense à Google, Meta,
TikTok, YouTube, par exemple, dans le rôle d'éducation puis de
sensibilisation que vous, vous promouvez?
Parce que vous nous avez beaucoup parlé, donc, de votre mission, vous, chez
HabiloMédias. Donc, ces plateformes-là, donc, quelle doit être leur
responsabilisation, donc, dans ce rôle éducatif là auprès des parents et des
jeunes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Il y
a plusieurs façons que je peux y penser. On a travaillé avec les organisations Google, YouTube pour créer des
ressources éducatives qu'on pouvait partager justement avec les parents pour les présentations des ateliers, du matériel
pédagogique. Déjà, dans ce modèle-là, on voit une part de la
responsabilité que j'encourage fortement. L'éducation, ça se fait, bon, dans
les salles de classe, on le reconnaît, qui veut dire qu'elle doit être balisée d'après ce qui se fait dans la
province ou dans la ville ou dans la salle de classe, dépendant du
niveau macro, microscopique qu'on voudrait envisager. Aussi, avec les parents,
ils doivent avoir accès à des ressources claires, ça, je l'ai mentionné au
début, pour les enfants, mais c'est vrai pour les personnes de tout âge,
qu'elles soient responsables pour des enfants ou non.
Quand on parle des conditions d'utilisation,
quand on parle des systèmes de soutien qui existent, ils doivent être faciles à
trouver, ils doivent être clairs. Et, ça aussi, ça nous a été suggéré, il faut
que les conséquences soient claires d'après les actions qui sont prises à
l'intérieur de leurs... excusez-moi, de leurs plateformes. Ils ont un rôle toujours, toujours important, ils doivent
continuer de rendre les plateformes plus saines et aussi... bon, là, excusez-moi,
je... sur le mot en anglais, «safe»...
Une voix : ...
M.
Ladouceur (Marc Alexandre) :
...plus sécuritaire, merci, afin que les gens puissent s'en servir avec
autant de confiance possible.
Mme Cadet : Puis c'est quoi, la
réceptivité de ces plateformes-là, selon vous, à jouer ce rôle-là, d'éducatif, puis de s'assurer que ces plateformes-là soient,
donc, plus saines et sécuritaires, comme vous venez de le mentionner?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : On a
déjà vu des changements intéressants, qui ont été proposés d'ailleurs suite à
notre recherche, là, avec toutes les propositions, par exemple, que j'avais
mentionnées. On a vu des éléments de protection plus sérieux pour les jeunes de
13 à 17 ans. En même temps, je ne veux pas parler pour la plateforme ou
pour les gens qui régissent ces plateformes-là, parce que, autant qu'on voit du
progrès, on veut être... on veut que le progrès soit continu. Et donc la
réceptivité que nous avons vue, pour protéger les jeunes, elle est
encourageante, et je voudrais qu'elle soit aussi toujours continue.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
qu'il y a d'autres interventions?
Mme Cadet : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Bien
oui, allez-y, Mme la députée.
Mme
Cadet : Oui. Bien, c'est ça. Donc, vous dites, donc,
cette... vous avez vu un... vous avez dénoté un certain progrès. Puis justement, je reviens à votre
mission éducative, est-ce que vous pensez que, dans ce rôle de
responsabilisation des plateformes sur l'éducation qui doit être faite à la
population, autant chez les jeunes que chez leurs parents... Donc, vous dites,
donc, la réceptivité, elle est bonne. Est-ce que vous pensez qu'il devrait y en
avoir plus pour justement vous aider à réaliser votre mission? Donc, plus de
progrès? Donc, comme vous avez dit, il y a des choses qui, selon vous, sont
intéressantes. Est-ce qu'il devrait y en avoir encore plus de la part des
plateformes?
M.
Ladouceur (Marc Alexandre) : Quand le ciel est bleu, le ciel est clair, la
réponse est toujours oui. C'est-à-dire... Excusez-moi. Je vous remercie
pour la curiosité par rapport à cette question-là, parce que c'est au coeur de ce qu'on suggère. Oui, oui et toujours oui, on
voudrait toujours voir plus de responsabilisation, on voudrait toujours voir
plus de protection, on voudrait toujours voir plus d'organisation et de
littératie encore, autant chez les plateformes. On serait contents de continuer
de voir des programmes voués à l'éducation aux médias dans les écoles aussi, on serait contents de voir des programmes
continus pour les adultes. Comme j'ai dit, quand le ciel est bleu, quand
le ciel est clair, la réponse est toujours oui. Mais pour les plateformes en
particulier, telle votre question, absolument.
Mme Cadet : Merci beaucoup. Merci,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
qu'il y a d'autres interventions? Alors, Mme Hill, M. Johnson,
M. Ladouceur, merci infiniment pour votre contribution à ces travaux.
Donc, pour ma part, étant donné qu'il n'y a plus
d'intervention, j'ajourne les travaux jusqu'au lundi 3 février,
14 heures. Donc, bonne fin de semaine, tout le monde.
(Fin de la séance à 11 h 48)